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LA MICROFLUIDIQUE

 


 

 

Paris, nouveau pôle mondial de la microfluidique
Olivier Hertel

Publié le 01-09-2014 à 18h40

La mairie de Paris a officiellement lancé les travaux qui feront de l’Institut Pierre-Gilles de Gennes un centre de recherche unique au monde en microfluidique.
Les fluides contenant les gouttelettes d’échantillons à analyser sont injectés dans la plaque de microfluidique. © Bernard Martinez pour Sciences et AvenirLes fluides contenant les gouttelettes d’échantillons à analyser sont injectés dans la plaque de microfluidique. © Bernard Martinez pour Sciences et Avenir


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MICROFLUIDIQUE. La maire de Paris, Anne Hidalgo, a officiellement lancé ce lundi 1er septembre les travaux qui feront de l’institut Pierre-Gilles de Gennes (IPGG) un centre de recherche unique au monde en microfluidique. À la rentrée 2015, l’IPGG regroupera 14 équipes de recherche de l’Ecole Supérieure de physique et de chimie industrielles de la ville de Paris (ESPCI ParisTech), l’ENS, l’Institue Curie et l’ENSCP. Soit quelque 140 chercheurs sur une plate-forme technologique de 5.900 mètres carrés.

Mais qu'est-ce que la microfluidique ? Et en quoi cette discipline est en passe de révolutionner la fabrication des médicaments ? Sciences et Avenir s'est rendu dans les locaux de Hifibio, une start-up fondée au sein de l'ESPCI ParisTech, il y a tout juste un an.

HIFIBIO. Au premier coup d’œil, la plaque, hérissée de minuscules tuyaux, semble parfaitement transparente. Mais quand Annabelle Gérard, chercheuse responsable des essais chez Hifibio, l’oriente vers la clarté d’une fenêtre et l’incline du bout des doigts, dans un sens puis dans l’autre, le regard perçoit de petites "nervures" régulières sur la surface. Celles-ci dessinent des formes géométriques étranges, plus ou moins complexes.

Ces nervures sont en fait de minuscules canaux, d’un diamètre de l’ordre du micromètre (0,001 millimètre, 100 fois plus fin qu’un cheveu), qui, par endroits, cheminent entre une paire d’électrodes. Dans ce réseau microscopique dessiné avec précision, toutes sortes de fluides — comme de l’eau ou encore de l’huile — circulent habituellement, entrant et sortant par les petits tuyaux qui dépassent de la plaque. Ces fluides charrient cellules, bactéries, molécules et autres "bizarreries" de biologistes, encapsulées dans des gouttelettes.

Quant aux électrodes, leurs décharges, parfaitement contrôlées, influencent le comportement des gouttelettes : elles les dévient vers un canal adjacent lorsqu’il faut les trier, elles les éclatent pour récupérer leur contenu, les fusionnent, etc. Tout devient possible.

Et cette technologie pourrait bien révolutionner l’industrie pharmaceutique et la recherche de nouveaux médicaments.

Nous pouvons tester des molécules 10.000 fois plus vite et pour 10.000 fois moins cher

Ce petit monde de manipulations microscopiques est celui de la "microfluidique", la spécialité de Hifibio. Cette start-up a été fondée il y a tout juste un an au sein de l’Ecole supérieure de physique et de chimie industrielles de la ville de Paris (ESPCI ParisTech). Mais elle attire déjà de grands laboratoires pharmaceutiques, qui depuis quelques années peinent à mettre sur le marché de nouveaux traitements vraiment efficaces. Aucun depuis trois ans, selon la revue médicale indépendante Prescrire. D’où la recherche d’innovations à tout prix.

Certes, des techniques robotisées dites de screening à haut débit permettent déjà d’effectuer des milliers de tests quotidiens afin de débusquer de nouveaux médicaments parmi les millions de molécules conservées dans les chimiothèques des laboratoires, et pour la plupart extraites du monde vivant.

Mais le savoir-faire d’Hifibio promet de les faire changer de vitesse. "Avec notre approche, nous pouvons tester quelques dizaines de milliers de molécules candidates en quelques heures contre quelques milliers par jour avec les techniques actuelles", explique Annabelle Gérard. "Nous sommes à peu près 10.000 fois plus rapides... et 10.000 fois moins cher", poursuit Jérôme Bibette, physicien à l’ESPCI et cofondateur d’Hifibio avec Andrew Griffiths. L’entreprise vient d’ailleurs de signer avec une société pharmaceutique un contrat de 5,5 millions d’euros pour réaliser des essais. "Et nous sommes en discussion avec d’autres industriels", assure Jérôme Bibette.

C’est la seule entreprise au monde à réaliser ces tests

Grâce à sa maîtrise de la microfluidique, Hifibio est la seule entreprise au monde à réaliser ces tests à l’échelle d’une cellule unique. L’intérêt : sélectionner la meilleure, celle qui produira par exemple l’arme la plus efficace contre un virus, une bactérie ou une tumeur. Pour comprendre, prenons un cas concret : un industriel cherche une molécule capable de neutraliser un virus.

Première étape, il inocule le virus à un lapin. Les cellules du système immunitaire de l’animal — les lymphocytes B — réagissent en produisant des anticorps. Ceux-ci se combinent alors à des molécules spécifiques du virus, présentes à sa surface, appelées antigènes.

Par la suite, le virus sera aussitôt reconnu par les anticorps grâce à ses antigènes, pour être neutralisé voire détruit par l’organisme. Mais certains lymphocytes B, ayant une plus grande affinité avec les antigènes, produisent de meilleurs anticorps. Et c’est justement cette "élite" qu’Hifibio est capable d’identifier. Après l’infection d’un lapin, les scientifiques de la petite entreprise française lui prélèvent du sang pour récupérer les lymphocytes B. Ils placent les cellules dans une solution nutritive puis les envoient dans un canal de la plaque de microfluidique. Ce canal va en croiser un autre dans lequel circule une huile avec un débit contrôlé. Les deux fluides ne pouvant se mélanger, l’huile va alors former une pellicule encapsulant une cellule unique avec un peu de son liquide nutritif.

Par cette manipulation, chaque gouttelette devient un milieu d’essai avec son lymphocyte B qui produira ses propres anticorps après quelques jours d’incubation. Ne reste plus aux chercheurs qu’à introduire les antigènes du virus cible et à détecter, au moyen d’un système optique, le lymphocyte B qui produit les anticorps les plus efficaces. Ils peuvent alors séquencer le gène à l’origine de cet anticorps idéal et produire ainsi en masse cette précieuse molécule thérapeutique.

Le procédé est exécuté à grande vitesse

Tout le procédé est bien sûr automatisé et exécuté à très grande vitesse à travers les canaux des petites plaques de microfluidique. Il permet de sélectionner ce que produit de mieux un individu (un lapin, une souris, un homme) pour se défendre contre un agent pathogène en peu de temps.

Mais en étendant le procédé à toute une population, il est aussi possible de sélectionner de la même manière l’individu dont les cellules produisent le meilleur anticorps. Ainsi, pour prendre l’exemple du sida, on sait que certaines personnes sont naturellement résistantes au virus. En sélectionnant celles qui le sont le plus, les chercheurs pourraient espérer trouver parmi elles la ou les cellules qui produisent les meilleures armes pour combattre le virus.

À condition, bien sûr, de connaître la cause de cette résistance. Pour Jérôme Bibette, le principe est finalement assez simple : "La nature dispose d’à peu près toutes les solutions à tous les problèmes !" À nous de trouver ces solutions.

NUMÉRIQUE. Cet article est extrait de Sciences et Avenir n°810. Le magazine est disponible à l'achat en version numérique via l'encadré ci-dessous.


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UN NOUVEAU VIRUS GÉANT...

 

Paris , 7 septembre 2015
Un nouveau virus géant découvert dans le permafrost sibérien

Des chercheurs du laboratoire Information génomique et structurale (CNRS/Aix-Marseille Université), du laboratoire Biologie à grande échelle1(CEA/Inserm/Université Joseph Fourier) et du Genoscope1 (CNRS/CEA) viennent de découvrir un virus géant d'un genre totalement nouveau, dans le même échantillon de permafrost2 de Sibérie, datant de 30 000 ans, d'où avait déjà été isolé Pithovirus3. Microscopie, génomique, transcriptomique, protéomique et métagénomique4, ont permis aux chercheurs de dessiner un portrait détaillé de ce nouveau virus, baptisé5 Mollivirus sibericum. Ces travaux sont publiés dans PNAS le 7 septembre 2015.
Après les Megaviridae (représentées par Mimivirus découvert en 2003), les Pandoraviridae (découverts en 2013) et le Pithovirus (décrit en 2014), c'est désormais une quatrième famille de virus géants, infectant les amibes du genre acanthamoeba, qui a été mise au jour par l'équipe de chercheurs à l'origine de la découverte de Pithovirus. C'est en persévérant dans l'étude de l'échantillon de sol gelé en provenance de l'extrême Nord-Est sibérien, dans lequel avait déjà été trouvé le Pithovirus, que les chercheurs ont isolé, amplifié, puis caractérisé ce nouveau virus, Mollivirus sibericum. C'est la première fois que toutes les techniques d'analyses du vivant, génomique, transcriptomique, protéomique et métagénomique, ont été utilisées simultanément pour caractériser un virus.
 
Ce virus se présente comme une coque oblongue d'environ 0,6 μm de long renfermant un génome d'environ 650 000 paires de base codant pour plus de 500 protéines. La plupart de ces protéines n'ont pas la moindre ressemblance avec celles de son prédécesseur sibérien, Pithovirus sibericum. De plus, à l'opposé de Pithovirus, qui n'a besoin que des ressources du cytoplasme de son hôte cellulaire pour se multiplier, Mollivirus sibericum utilise le noyau cellulaire pour se répliquer6 dans l'amibe ce qui le rend aussi dépendant de son hôte que la plupart des "petits" virus. Cette stratégie et d'autres caractéristiques spécifiques, comme un déficit en certaines enzymes clés permettant la synthèse des briques de base de son ADN, rapproche Mollivirus sibericum des types de virus courants parmi les pathogènes humains comme les Adénovirus, les Papillomavirus, ou les Herpesvirus. De son coté, Pithovirus se multiplie dans le cytoplasme, à la façon des Poxvirus, famille à laquelle appartient le virus responsable de la variole, officiellement éradiqué. Forme, mode de réplication, métabolisme : Mollivirus sibericum représente bien une nouvelle famille de virus distincte des trois familles de virus géants déjà répertoriées. Un nouveau type de virus qui n'avait jamais été observé auparavant.

Cette découverte, qui suggère que les virus géants ne sont pas rares et sont très diversifiés, prouve aussi que la capacité des virus à survivre dans le permafrost sur de très longues périodes n'est pas limitée à un type particulier de virus, mais couvre probablement des familles virales aux stratégies de réplication très variées et donc potentiellement pathogènes. Les résultats de l'analyse métagénomique de cet échantillon de permafrost, qui montre une concentration extrêmement faible du Mollivirus (de l'ordre de quelques parties par million), ont aujourd'hui des implications importantes en termes de santé publique. Quelques particules virales encore infectieuses peuvent en effet être suffisantes, en présence de l'hôte sensible, à la résurgence de virus potentiellement pathogènes dans les régions arctiques de plus en plus convoitées pour leurs ressources minières et pétrolières et dont l'accessibilité et l'exploitation industrielle sont facilitées par le changement climatique.

Afin de déterminer si d'autres virus géants se cachent encore dans le permafrost, les chercheurs étudient7 désormais des couches plus anciennes du sol sibérien, dans une région qui devrait leur permettre d'atteindre - 1 million d'années.

 

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LES INSECTES

 

 La perfection technique des insectes

Des prises effectuées au très grand ralenti aident à comprendre la mécanique sophistiquée qui permet aux insectes de réaliser des sauts impressionnants.


MECANIQUE. Dick Fosbury, Mike Powell, Jonathan Edwards. Le podium des meilleurs sauteurs de l'histoire olympique serait bouleversé si les insectes pouvaient participer. Trop rapides, trop vifs, les insectes agacent tout autant qu’ils impressionnent par leur capacité à exécuter des mouvements à une vitesse qui nous dépasse. Les derniers résultats présentés jeudi 2 juillet 2015 à la conférence annuelle de The Society for Experimental Biology par des chercheurs des universités de Bristol et de Cambridge décryptent comment les hexapodes sont capables de telles prouesses physiques. Et peut-être comprendre pourquoi il semble impossible d’attraper cette satanée mouche ou d’écraser ce moustique qui vous empêchent de dormir depuis des heures.
Transfert d’énergie
L’équation est relativement simple en apparence : comment déclencher un saut puissant et maîtrisé en une fraction de seconde ? Il pourrait ne s’agir que d’un réflexe ce qui expliquerait cette rapidité. Sauf que les insectes parviennent à réaliser ces mouvements aux bons moments, en particulier lorsqu’il s’agit d’échapper à votre tapette à mouches. Pour effectuer ces sauts, ils ont besoin d’avoir une réserve d’énergie suffisante pour propulser leur corps suffisamment vite et loin. Cette énergie est selon Gregory Sutton, coordinateur des recherches, stockée à la manière d’un ressort ou d’un arc. En appuyant sur le premier ou en bandant le second, nous permettons à l’énergie d’être emmagasinée avant d’être libérée à l’instant T. C’est le même principe pour les mouches, sauterelles et autres criquets. À cette différence que chez eux l’arc, la corde et la flèche ne font qu’un. Les chercheurs ont ainsi observé qu’ils se déplaçaient sur les quatre pattes avant et gardaient les deux membres postérieur "en alerte" pour déclencher un saut sur commande. Ce que nous bipèdes ne sommes pas capables de réaliser, à moins d’être immobiles et de pousser sur nos jambes. Ils ont également noté qu’il fallait quelques secondes pour que cette énergie soit disponible. La composition organique issue d’un mélange de cuticules et d’une protéine bleue fluorescente nommée "resilin" explique cette efficacité et donne un alliage proche de ce qui constitue nos arcs modernes.


Une mécanique bien huilée
Pour assurer l’efficacité de ce transfert d’énergie, une mécanique de précision est nécessaire. Un assemblage de ce que Gregory Sutton et ses équipes comparent aux roues dentées que l’on trouve dans les mécanismes des horlogers les plus fins. L’image qu’ils donnent pour comprendre le mouvement est celle d’une fermeture éclair. Les jambes arrières des insectes se referment l’une sur l’autre à la manière du zip d’un blouson. Sans cela, les arthropodes sauteurs seraient déséquilibrés au moment de leur envol et n’auraient aucune maîtrise. En mars, la qualité du saut des mantes religieuses avait déjà été mise en ava
nt.

 

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ÉVOLUTION ET CANCER

 

Paris, 16 novembre 2012


Evolution et cancer : pourquoi les gènes « dangereux » ont-ils été multipliés et conservés au cours de l'évolution ?


Si l'on s'accorde facilement sur la conservation des gènes essentiels à la vie des organismes au cours de l'évolution, à l'inverse, l'étonnante multiplication des gènes à l'origine des cancers ou d'autres maladies génétiques pose question. L'équipe d'Hervé Isambert(1) , en partenariat avec celle de Jacques Camonis(2) , viennent d'apporter une réponse inattendue à ce problème. Jusqu'à présent, il était supposé que ces gènes « dangereux » conféraient malgré tout un avantage sélectif. Or leur dernière recherche, publiée en ligne dans Cell Reports du 15 novembre, montre que ces gènes ont en fait été multipliés et conservés en raison de leur dangerosité à la suite d'un accident génétique majeur, une duplication globale de génome.
Le cancer résulte d'une série d'accidents génétiques qui se produisent par étapes. Le point de départ de ce processus est l'altération du matériel génétique d'une cellule. Toutes les mutations ne sont toutefois pas susceptibles d'entraîner la formation d'un cancer. Un des gènes qui régulent les processus vitaux de la cellule (division, différenciation, réparation ou apoptose) doit être "touché". Ce sont ces gènes, comme les oncogènes, que l'on qualifie de « dangereux ». Suite à une altération, l'oncogène est activé, ce qui donne lieu à une prolifération incontrôlée de la cellule. Une mutation au niveau d'une seule des deux copies de ce gène – dans notre patrimoine génétique, les gènes sont présents en deux copies, l'une héritée de notre mère, l'autre de notre père – est nécessaire pour entraîner le développement d'un cancer.

Mais comment ces gènes « dangereux » ont-ils été multipliés et conservés au fil de l'évolution, malgré les risques qu'ils représentent ? C'est la question que se sont posée conjointement deux équipes de l'Institut Curie, celle d'Hervé Isambert, directeur de recherche CNRS, et celle de Jacques Camonis, directeur de recherche CNRS.

De l'expansion des gènes dangereux chez les vertébrés

« Pour bien comprendre l'histoire des gènes que l'on considère comme dangereux, il faut remonter à l'ancêtre commun à tous les vertébrés, un petit invertébré marin, qui vivait il y a quelque 500 millions d'années » explique en préambule Hervé Isambert. Par un mécanisme presque toujours létal, mais qui a joué un rôle essentiel au cours de l'évolution, cette lignée d'invertébrés a entièrement dupliqué son génome deux fois de suite et survécu à ces deux accidents génétiques majeurs. Résultat : des organismes présentant jusqu'à 4 exemplaires de tous leurs gènes. « Cet événement est fondateur puisqu'il va être le point de départ de la complexification des organismes et de l'émergence des vertébrés ». Environ un quart à un tiers de nos gènes serait directement issu de ces deux duplications de génome à l'origine des vertébrés ; on appelle ces gènes ohnologues.

« Après une duplication globale de génome, les organismes vont progressivement éliminer 80 à 90 % des copies de leurs gènes, mais de façon surprenante les gènes dangereux vont être davantage conservés, car ils sont plus difficiles à supprimer » explique Hervé Isambert. En conséquence, la quantité de gènes « dangereux » a littéralement explosé chez les vertébrés où ils sont jusqu'à 4 fois plus nombreux que chez les invertébrés. Ainsi le gène Ras de la mouche a conservé chez les vertébrés trois ohnologues (KRas, HRas et NRas), qui sont au cœur de nombreuses voies de signalisation et se trouvent activés en permanence dans près de 25 % des cas de cancer.

Alors pourquoi les multiples copies de ces gènes « dangereux » n'ont-elles pas été éliminées chez les vertébrés ? « Pour le comprendre, il faut avoir en tête que la duplication globale du génome, lorsqu'elle n'est pas létale, implique nécessairement l'apparition d'une nouvelle espèce dans laquelle tous les individus possèdent initialement tous leurs gènes en double », ajoute le chercheur, « mais aussi que tous les gènes ne sont pas égaux face aux mutations. » Les gènes « dangereux » se caractérisent par le fait qu'une mutation entraîne fréquemment une sur activation, c'est-à-dire un gain de fonction plutôt qu'une perte de fonction. En général, la perte de fonction d'un ohnologue ne pose pas de problème tant qu'il reste une copie fonctionnelle de ce gène. Ceci conduit à l'élimination progressive d'une des copies de la plupart des ohnologues « non-dangereux ».

A l'inverse, la survenue de mutations conduisant à des gains de fonction, qui caractérisent les ohnologues « dangereux », va entraîner des pathologies du développement ou des tumeurs. Celles-ci pénalisent les organismes atteints et, plus ou moins directement, leur descendance qui finira par s'interrompre. Pour autant, les gènes dangereux impliqués ne sont pas éliminés mais au contraire conservés, puisqu'ils sont encore présents sous une forme non-délétère dans le reste de la population issue de la duplication de génome. Ce processus évolutif par élimination de mutants se distingue du concept d'avantage sélectif généralement associé à l'évolution.

Tout est donc lié à ce phénomène spécifique et très rare de duplication globale du génome. Ensuite ces gènes se sont différenciés pour devenir des acteurs majeurs du développement, de la signalisation et de la régulation cellulaires. Par exemple les cadhérines, sorte de colle qui lient les cellules entre elles, ont conservé de multiples ohnologues exprimés dans différents tissus, comme la E-cadhérine qui lie les cellules épithéliales entre elles ou la N-cadhérine exprimée dans les neurones. Mais les mutations des cadhérines qui entrainent la séparation des cellules entre elles sont aussi impliquées dans la migration des cellules tumorales et donc leur dissémination vers d'autres organes. Cet exemple parmi tant d'autres illustre l'importance de cette double duplication du génome survenue il y a 500 millions d'années dans l'évolution des vertébrés. Elle a permis l'émergence d'organismes plus complexes, mais aussi la multiplication des gènes dangereux chez les vertébrés.


Notes :
(1)Hervé Isambert est directeur de recherche CNRS, chef d'équipe dans l'unité Physico-chimie Curie Institut Curie/CNRS UMR 168/UPMC
(2)Jacques Camonis est directeur de recherche CNRS et chef d'équipe dans l'unité Génétique et biologie des cancers - Institut Curie/Inserm U830
Références :
On the expansion of “dangerous” gene repertoires by whole genome duplications in early vertebrates
P. P. Singh(1), S. Affeldt(1), I. Cascone(2), R. Selimoglu(2), J. Camonis(2), H. Isambert(1)
(1) CNRS UMR168 UPMC, Institut Curie,
(2) Inserm U830, Institut Curie,
Cell Reports, publication en ligne, 15 novembre 2012

 

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