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inégalités sociales
Consulter aussi dans le dictionnaire : inégalité
Cet article fait partie du dossier consacré aux droits de l'homme.
Inégalités de ressources des individus.
LES INÉGALITÉS DANS LE MONDE
L'égalité entre les hommes est proclamée tant par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 que par la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948. Or, les écarts de richesse et de développement entre les différents pays du monde sont considérables : près de 80 % des richesses de la planète sont entre les mains de la trentaine de pays les plus riches (soit 20 % de la population mondiale). La majorité des pauvres dans le monde vivent en Asie méridionale (39 %), en Asie orientale (33 % ; essentiellement en Chine et dans le Sud-Est asiatique) et en Afrique subsaharienne (17 %).
Ces inégalités de revenus rejaillissent l’alimentation et sur la santé, donc sur l'espérance de vie. Dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, celle-ci est certes passée de 40 ans en 1950 à 65 ans en 2000. Mais, dans les pays industrialisés, elle augmente d’environ un an tous les cinq ans, et atteint de nos jours 80 ans. Par manque de moyens, y compris d'information, la lutte contre certaines maladies n'est pas généralisée : ainsi, le taux moyen de vaccination contre la rougeole à l'échelle mondiale n'est que de 80 % (et d'environ 60 % en Afrique subsaharienne) ; de même, l'épidémie de sida est difficile à enrayer en Afrique noire. Les inégalités de développement ont également des conséquences sur l'éducation (faible taux de scolarisation, analphabétisme) et, plus généralement, sur le droit au bonheur des populations.
L'indice de développement humain (ou IDH) permet d'apprécier, sur le plan humain, l'amélioration des conditions de vie d'un pays. Il prend en compte trois éléments qui représentent pour chaque société des objectifs à atteindre : l'espérance de vie, l'accès à l'éducation et à la culture, le niveau de vie. En règle générale, plus le pays est riche, plus l'IDH est élevé.
L'OPPOSITION NORD-SUD
Le « Nord » rassemble les pays développés à économies industrielle et tertiaire qui dominent l'économie mondiale. Les pays de la « Triade » (États-Unis, Union européenne, Japon) sont les plus riches. Dans ces pays, le niveau de vie est élevé, l'espérance de vie approche en moyenne 80 ans, la croissance démographique est faible et la population a tendance à vieillir. Néanmoins, ces pays connaissent des crises économiques (avec un chômage important) et des inégalités sociales persistantes.
Mais la situation est encore plus contrastée dans les pays du « Sud ». Ces pays en développement, caractérisés par une économie à dominante agricole, sont généralement confrontés à des problèmes démographiques (population jeune qu'il est difficile de nourrir, loger et scolariser). Les P.M.A. (ou pays moins avancés), situés majoritairement en Afrique, connaissent de très grandes difficultés (famines, épidémies, analphabétisme). Certains pays en développement ont amorcé leur décollage économique dans les années 1980 et sont devenus les « nouveaux pays industriels (ou industrialisés) » : il s’agit d’abord les « quatre dragons » d'Asie (la Corée du Sud, Taïwan, Singapour et Hongkong), suivis des « tigres » de l’Asie du Sud-Est (Thaïlande, les Philippines et la Malaisie). À l'expression « nouveaux pays industriels » s’est substituée celle de « pays émergents » : la Chine, l'Inde et l'Indonésie, de même que des pays latino-américains comme le Brésil et l'Argentine relèvent aujourd'hui de cette catégorie. On distingue également les pays exportateurs de pétrole, qui ont souvent une croissance élevée mais dont l'IDH est faible.
FACTEURS ET PERSPECTIVES
Plusieurs explications peuvent être mises en avant pour tenter d'expliquer ces écarts de développement. À des facteurs internes (conditions climatiques, médiocrité des techniques agricoles, conséquences de la domination coloniale, explosion démographique, etc.) s'ajoutent des facteurs externes (inégalité des échanges internationaux, dépendances financière et technique à l'égard des pays industrialisés). Cependant, aucun facteur n'est à lui seul cause de pauvreté et les inégalités de développement découlent de leur accumulation.
Pour remédier à cette situation, les gouvernements des pays riches, l'O.N.U. et ses organismes spécialisés (F.A.O., O.M.S., UNICEF), ainsi que les organisations non-gouvernementales (O.N.G.) mettent en place des projets d'aide et de développement : envoi de nourriture, aide technique… Cependant, cette aide s'avère parfois inadaptée et reste encore insuffisante. En outre, les politiques menées par les institutions monétaires internationales – le Fonds monétaire international, qui accorde des prêts aux pays en développement, et la Banque mondiale, qui leur apporte une assistance technique et financière – sont souvent critiquées en raison de leur inadéquation. Afin de soulager de nombreux pays en développement, grevés par le fardeau de leur dette, des plans sont mis en place afin d’échelonner, voire annuler la dette des pays pauvres les plus endettés.
LES INÉGALITÉS EN FRANCE
En France, 10 % des foyers détiennent près de la moitié de la richesse nationale et les 10 % des habitants les plus riches perçoivent 30 % des revenus avant impôt. Si l'espérance de vie, au cours du xxe s., y est passée de 45 ans à 79 ans en moyenne, hommes et femmes confondus, celle des ouvriers de 35 ans est inférieure de 7 ans à celle des cadres du même âge. Les enfants issus des milieux modestes représentent encore moins de 10 % des élèves des quatre plus grandes écoles (Polytechnique, ENS, ENA, École des hautes études commerciales).
Dans les faits, la mobilité sociale ne garantit pas la promotion sociale. Les inégalités nourrissent le sentiment d'insécurité, à la fois chez l'individu en situation de précarité et dans l'ensemble de la collectivité face à la montée de la criminalité. Aussi l'État est-il sollicité pour mettre en œuvre la solidarité et éviter la rupture du contrat social.
LES INÉGALITÉS ÉCONOMIQUES
« Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits ; les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune », affirme l'article premier de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789. Le principe d'une égalité juridique n'a pas supprimé pour autant les disparités matérielles et culturelles. Le constat de ces dernières ainsi que la réflexion sur l'idée d'égalité ont conduit à diverses interprétations des causes des inégalités sociales, et à la conception de moyens visant à les réduire ou à les supprimer.
LES ACQUIS DE L’ÉTAT-PROVIDENCE
Dès ses prémices, la pensée politique moderne a désigné les inégalités économiques comme la manifestation majeure des inégalités sociales et le principal obstacle à l'institution de rapports sociaux égalitaires : s'il n'est pas la seule cause déterminante des inégalités, le montant du revenu monétaire, mesure du pouvoir d'achat, commande directement la qualité des conditions quotidiennes d'existence, notamment celles du logement, de la consommation et de la formation. Sur une longue période, l'objectif de rapprochement des « degrés extrêmes » (entre les classes les plus pauvres et les plus aisées) s'est tendanciellement réalisé par le resserrement de l'éventail des revenus, sous l'effet de trois processus : le développement de luttes ouvrières visant à l'augmentation du salaire ; la révolution industrielle continue, qui a débouché au xxe s. sur l'extension mondiale d'un système de production et de consommation de masse, le fordisme, entraînant une démocratisation de l'accès à certains biens et à certaines pratiques ; enfin, la formation, dans les sociétés développées, d'un État providence qui assure une forme de redistribution des richesses – par le biais de la fiscalité et la mise en place de la sécurité sociale (prestations familiales, assurance-maladie, retraites) et de l'assurance-chômage, à quoi s'ajoute l'instauration d'un salaire minimum garanti.
L'INÉGALITÉ DEVANT LE TRAVAIL
En dépit de ce progrès objectif, les inégalités économiques dans la France de la fin du xxe s. non seulement perdurent, mais, pour une partie croissante de la population, s'aggravent de façon alarmante, à l'encontre de l'exigence posée par Rousseau que « nul citoyen ne soit assez opulent pour en pouvoir acheter un autre, et nul assez pauvre pour être contraint de se vendre ». Une misère moderne est née, que désigne l'euphémisme de « grande pauvreté », conséquence d'un chômage de masse, frappant environ trois millions d'individus, et qui traduit une accentuation de l'inégalité devant l'emploi, la qualification, l'enseignement. Les économistes parlent de « marché dual du travail » ; les journalistes, de « société à deux vitesses ».
Si elle produit ainsi une nouvelle population d'exclus, l'inégalité devant le travail apparaît aux travailleurs eux-mêmes comme l'inégalité fondamentale, que les disparités de revenus ne font sans doute que refléter : le travail constitue la source principale des revenus, en dépit de l'importance croissante des revenus sociaux ; les formes de travail sont inégalement pénibles ou gratifiantes, et le travail le plus rebutant est souvent le plus faiblement rémunéré ; enfin, le travail distingue celui qui l'exerce (« paysan » peut être un terme péjoratif, mais non « docteur »). Pour ces raisons, l'inégalité devant le travail est le véritable fondement de la stratification sociale.
CUMUL ET REPRODUCTION DES INÉGALITÉS
DES INÉGALITÉS QUI S'ADDITIONNENT
Rousseau énonçait déjà, dans sa théorie des inégalités, que celles-ci tendent à se cumuler comme se cumulent les privilèges. Et il est vrai que, le plus souvent, ceux qui bénéficient le moins des avantages de la société de consommation vivent dans les habitations les moins confortables et sont également écartés le plus tôt du système éducatif ; ce sont eux qui basculent le plus facilement dans la délinquance et la criminalité, eux encore que police et justice privent de liberté avec le plus d'empressement. Ils sont enfin les premières victimes de l'inégalité devant la santé – l'on observe chez eux une moindre fréquence des actes médicaux et des consultations de spécialistes –, et devant la mort, comme le montrent les différentiels d’espérance de vie entre les catégories [profession et catégorie socioprofessionnelle (PCS)] extrêmes : un homme de 35 ans a une espérance de vie moyenne de 39 années s'il est ouvrier, et de 46 s'il est professeur.
LA « TRANSMISSION DES INÉGALITÉS »
D'autre part, même si les inégalités ne se transmettent pas exactement comme une part de capital, la sociologie contemporaine a mis en lumière les mécanismes qui tracent, pour les individus des itinéraires analogues à ceux de leurs pères dans le champ de la vie professionnelle et culturelle. Ce phénomène de reproduction, qui paraît obéir à des règles purement économiques, se produit en réalité de façon déterminante dans le champ culturel, principalement le système éducatif. L’école moderne apparaît ainsi comme l'institution la plus appropriée à la lutte contre les inégalités sociales, tout en contribuant à les reproduire.
Les travaux de Pierre Bourdieu et de Jean-Claude Passeron, les Héritiers (1964) et la Reproduction (1970), ont levé ce paradoxe en portant au jour les mécanismes par lesquels l'institution scolaire transforme en mérite ou en don le capital culturel dont héritent les enfants des classes favorisées, contribuant ainsi, par un fonctionnement apparemment démocratique, à reproduire le clivage entre les « héritiers » et les déshérités et, par là, à perpétuer les inégalités initiales de chances devant la culture. En évaluant de manière formellement égale les aptitudes d'enseignés socialement inégaux, l'école méconnaît, ou néglige volontairement, mais aussi consolide, les disparités de compétences acquises dans la famille : de la sorte, elle « confère aux privilégiés le privilège suprême de ne pas s'apparaître comme privilégiés », tandis qu'« elle parvient d'autant plus facilement à convaincre les déshérités qu'ils doivent leur destin scolaire et social à leur défaut de dons ou de mérites. »
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fascisme
(italien fascismo, de fascio, faisceau)
Consulter aussi dans le dictionnaire : fascisme
Cet article fait partie du dossier consacré au totalitarisme.
Régime établi en Italie de 1922 à 1945, instauré par Mussolini et fondé sur la dictature du parti unique, l'exaltation nationaliste et le corporatisme. Doctrine ou tendance visant à installer un régime autoritaire rappelant le fascisme italien.
1. LES ORIGINES DU FASCISME ITALIEN
On ne saurait comprendre l'émergence du fascisme sans un rappel des déséquilibres et dysfonctionnements de l'Italie issue du Risorgimento.
1.1. L'UNITÉ INACHEVÉE DE L'ITALIE
L'État national italien s'est établi tardivement. Il faut attendre la décennie 1860-1870 pour que se constitue en 1861 autour du Piémont-Sardaigne le royaume d'Italie (→ histoire de l'Italie). L'annexion de Rome – source d'un contentieux avec la papauté – est accomplie seulement à l'automne 1870. Réalisée par le haut, la Renaissance nationale (→ Risorgimento) n'a pas permis d'intégrer les masses populaires.
Qui plus est, jusqu'à l'introduction du suffrage universel masculin en 1912, le système politique (régi par la Constitution de 1848 [lo Statuto]), est dominé par les élites traditionnelles grâce à l'instauration d'un régime censitaire. À la veille de la Première Guerre mondiale, l'Italie souffre d'un décalage croissant entre le pays légal et le pays réel.
Le refus des catholiques de participer aux élections, l'absence de véritables partis politiques, le recours permanent à la combinazione pour dégager des majorités, les méfaits du clientélisme concourent à ruiner la légitimité de l'édifice politique.
Ces difficultés se renforcent de l’inégalité du développement économique entre le Nord industrialisé (Gênes, Milan, Turin) et un Sud (Mezzogiorno) à vocation agricole.
L'habileté de Benito Mussolini, l'agitateur socialiste qui va devenir le principal promoteur du fascisme, est précisément de tirer parti de ces difficultés au moment où se dessinent les contours d'une crise d'identité nationale.
Le terme de faisceaux, qui renvoie à l'Antiquité romaine, apparaît d'ailleurs pour la première fois en Italie à propos du soulèvement des paysans de Sicile qui, en 1893-1894, forment des « faisceaux » de grévistes révoltés contre les conditions de travail inhumaines dans une province laissée pratiquement à l'abandon par le gouvernement de Rome. Ce mouvement rencontre de nombreuses sympathies dans toutes les classes sociales et contribue au développement de l'idéologie socialiste, qui ne cesse de progresser, spécialement dans la vallée du Pô, durant les vingt années séparant cet épisode révolutionnaire de la Première Guerre mondiale.
1.2. LA POUSSÉE ULTRA-NATIONALISTE
En 1914, il existe dans le pays une minorité composite formée de nationalistes bourgeois et de jeunes prolétaires anarcho-syndicalistes qui espèrent trouver dans la guerre le moyen de secouer l'immobilisme d'un régime aux mains du monde conservateur.
Bien que suscitée par des mobiles contradictoires, leur propagande retient vite par sa violence l'attention de Mussolini, qui y discerne pour lui-même l'occasion de s'élever politiquement sans que, toutefois, le but ultime de cette ascension – la conquête du pouvoir – lui apparaisse encore.
Peu à peu se dégage ainsi un courant idéologique influencé tout à la fois par le syndicalisme antiparlementaire notamment représenté par Hubert Lagardelle, le thème de la régénération par la violence de Georges Sorel, le nationalisme de Charles Maurras et celui de Gabriele D'Annunzio.
1.3. MUSSOLINI, L'ENTRÉE EN JEU D'UN OBSCUR MILITANT
Au printemps de 1914, l'ex-instituteur Benito Mussolini acquiert une première célébrité durant la « semaine rouge » qui bouleverse la vie des provinces limitrophes de l'Adriatique. Il dirige alors le principal quotidien socialiste, Avanti !, qui paraît à Milan ; lorsque la guerre éclate, il y exprime le refus radical des socialistes italiens de participer à la guerre dans laquelle s'engagent les grandes puissances.
Soudain, en octobre 1914, après avoir noué des contacts dans les milieux qui sympathisaient avec la cause alliée, Mussolini abandonne la direction d'Avanti ! ainsi que le parti socialiste pour fonder en novembre un quotidien rival, Il Popolo d'Italia, qui va soutenir une politique diamétralement opposée à celle de ses anciens amis. Il prône la nécessité, pour la grandeur de l'Italie et le triomphe d'une révolution constructive, de rompre l'alliance avec les Empires centraux (Allemagne et Autriche-Hongrie) et de participer à la guerre aux côtés de la France et de la Grande-Bretagne, ce qui va finalement se produire en mars 1915 (→ Première Guerre mondiale).
1.4. LA « VICTOIRE MUTILÉE » ISSUE DE LA PREMIÈRE GUERRE MONDIALE
En 1918, l'Italie sort victorieuse mais déçue dans ses espoirs d'expansion et profondément troublée à l'intérieur.
Le succès de la révolution russe de 1917 y a fortifié les positions du parti socialiste, demeuré foncièrement hostile à la participation de l'Italie à un règlement de comptes international, qui, en somme, ne la concernait pas directement. La classe ouvrière le fait durement sentir aux officiers, insultés, et parfois brutalisés dans les rues, tandis que les syndicats, les maisons du peuple et les coopératives socialistes prennent un essor considérable.
Ces violences et ces succès de l'idéologie révolutionnaire ne tardent pas à susciter l'inquiétude des milieux bourgeois, surtout des propriétaires fonciers de la vallée du Pô, auxquels les grèves endémiques des travailleurs agricoles causent des pertes croissantes.
1.5. LES FAISCEAUX DE COMBAT
Dès le 23 mars 1919, à l'appel de Mussolini, une organisation groupant, sous le nom de Faisceaux de combat (dont l’uniforme est la Chemise noire), les éléments qui ont favorisé l'intervention italienne dans la guerre, auxquels se sont joints nombre d'officiers et de soldats démobilisés, se constitue place San Sepolcro, à Milan, et esquisse un programme d'action politique et sociale.
Ce programme dit de San Sepolcro, sans grande portée, mêle des revendications traditionnelles – telles que la journée de huit heures, le salaire minimum garanti ou la représentation proportionnelle aux élections – à des résurgences anticléricales et antimilitaristes d'un autre âge.
2. LA MONTÉE DU FASCISME EN ITALIE
2.1. DES DÉBUTS MODESTES (1919-1920)
Le mouvement fasciste est né, mais il n'a pas encore trouvé sa voie. Mussolini s'en rend compte lorsque, en novembre, ayant rompu avec une coalition électorale disparate et tenté sa chance seul à Milan, il n'obtient que 5 000 voix sur 270 000 votants, alors qu'il en escomptait 80 000. Ses amis socialistes d'autrefois remportent au contraire un éclatant succès (170 000 voix), mais l'heure de la revanche ne tardera pas.
Quand, en septembre 1920, les grèves s'étendent des services publics aux industries métallurgiques et à l'occupation des usines de Milan et de Turin – avec mort d'hommes – s'amorce en effet un choc en retour ; il ne cessera plus de s'amplifier et donnera au fascisme sa physionomie définitive de mouvement d'extrême droite.
Dans la typologie des fascismes établie par l'historien Pierre Milza (les Fascismes, 1985), cette agitation plébéienne et contestataire correspond au « premier fascisme ».
2.2. L'ESSOR DU FASCISME (1920-1922)
LA VIOLENCE COMME MOYEN D'AFFIRMATION
Les fils de propriétaires terriens, de membres des professions libérales, voire de commerçants et d'artisans s'organisent en escouades (squadre) de Chemises noires pour exercer des « expéditions punitives » ; l'argent leur est prodigué par les possédants, et l'armée leur accorde un soutien moral et souvent même des moyens de transport. Ils tombent à l'improviste dans un village, un bourg, une petite ville, mettent à sac ou incendient les lieux de réunion et les coopératives socialistes, en chassent et parfois tuent les occupants, puis regagnent les grands centres sans être poursuivis.
La terreur est telle dans la basse vallée du Pô que les paysans, épouvantés, désertent en grand nombre les ligues socialistes et s'inscrivent dans des orgnisations rivales que les fascistes font surgir pour regrouper, selon de nouvelles directives de type « paternaliste », ceux qui veulent bien les accepter.
L'ENTRÉE DES FASCISTES AU PARLEMENT (MAI-JUIN 1921)
Mal soutenu par l'opinion publique, le gouvernement réagit mollement. Le vieux libéral Giovanni Giolitti, redevenu chef du gouvernement en juin 1920, espère neutraliser les jeunes forces fascistes dans les combinaisons parlementaires traditionnelles ; pour cela, il favorise leur insertion dans la majorité qu'il escompte obtenir, après dissolution de la Chambre « ingouvernable » de 1919, à la faveur de nouvelles élections en mai 1921. Mais, cette fois, ses calculs s'avèrent illusoires.
Vingt-cinq profascistes et deux fascistes inscrits au « bloc national » sont élus grâce aux complaisances des autorités, et au premier rang, triomphalement, Mussolini à Bologne et à Milan avec 125 000 voix plus conservatrices qu'ouvrières. Dans le même temps de juillet 1920 à novembre 1921, le nombre des Faisceaux constitués à travers le pays passe de 108 à 2 300.
Si le chef du mouvement siège à l'extrême droite, son premier discours, le 21 juin 1921, attendu avec impatience, surprend par sa modération. En politique extérieure, Mussolini demeure attaché aux thèses nationalistes, et par conséquent hostile au traité de Rapallo conclu avec la Yougoslavie le 12 novembre 1920 par lequel l'Italie a renoncé à la Dalmatie pourtant revendiquée par les irrédentistes.
En revanche, il tend la main à la Confédération générale du travail, dans laquelle il feint de discerner un réformisme constructif opposé aux maximalistes du groupe parlementaire socialiste et au jeune parti communiste constitué en janvier à Livourne.
Surtout, Mussolini se montre plein de déférence envers l'Église catholique. Au Vatican, nombre d'esprits s'ouvrent à l'espoir de mettre fin, avec un « homme sans préjugés » comme Mussolini, à l'insoluble « question romaine » d'une papauté tournant le dos à l'État italien.
LA PREMIÈRE CRISE DU FASCISME (JUIN-NOVEMBRE 1921)
Mussolini s'efforce alors de convaincre ses amis de l'utilité d'un apaisement à l'intérieur et formule des offres de collaboration entre « les trois forces agissantes à l'heure présente dans la vie du pays » (socialistes modérés, démocrates-chrétiens du parti populaire italien et fascistes).
Mais ses partisans voient bien que leur leader songe avant tout à son triomphe personnel. Or, que serait-il sans eux ? pensent beaucoup de jeunes bourgeois activistes. Ils se refusent, dès lors, à jouer le rôle d'« utilisés » dans le mouvement et le font durement comprendre à Mussolini, principalement Dino Grandi, avocat de Bologne, dans son journal L'Assalto et lors d'un congrès de dirigeants provinciaux tenu dans cette ville le 17 août. Mussolini y est mis en minorité et doit s'incliner, renonçant à l'idée du pacte de pacification avec socialistes et démocrates-chrétiens.
NAISSANCE DU PARTI NATIONAL FASCISTE (NOVEMBRE 1921)
L'année 1921 se termine par un congrès national du fascisme en novembre à Rome, qui voit la transformation des Faisceaux de combat en un parti national fasciste et consolide son alliance avec le grand capital – alliance soudée par la renonciation totale aux nationalisations envisagées dans le programme initial de 1919.
Cet accord avec les milieux d'affaires correspond au « deuxième fascisme » dans la typologie de Pierre Milza.
Enfin, Mussolini est triomphalement réélu à la tête de la commission exécutive des Faisceaux.
2.3. LA CONQUÊTE DU POUVOIR
L'IMPUISSANCE DU RÉGIME PARLEMENTAIRE
Dès lors, le ministère Bonomi, qui a succédé à Giolitti le 1er juillet, s'efforce de résister au désordre, mais il se heurte à une recrudescence de la violence fasciste, qui brave ouvertement les autorités préfectorales ou municipales. Un projet de dissolution des escouades de combat est abandonné par le gouvernement, qui n'aurait pu le réaliser qu'au prix d'une guerre civile, le concours de l'armée régulière ne lui étant même pas assuré. Bonomi est finalement renversé par une coalition des socialistes, indignés de sa faiblesse, des fascistes, qui se jugent persécutés, et d'une partie des partisans de Giolitti, désireux de ramener leur chef au pouvoir.
Il s'ensuit une crise de deux mois (février-mars 1922), qui aboutit au pire résultat : un cabinet dirigé par un médiocre lieutenant de Giolitti, Luigi Facta, le recours au vieux leader ayant été écarté par le secrétaire général du parti populaire, don Luigi Sturzo, qui espérait placer l'un des siens à la présidence du Conseil.
Désormais, rien ne peut plus s'opposer à la vague fasciste, qui s'oppose à l'agitation sociale, de gauche, brisant par la force grèves et occupations d'usines.
MUSSOLINI PRÉSIDENT DU CONSEIL (OCTOBRE 1922)
Comme rien ne semble plus pouvoir fonctionner dans le pays sans l'aval du parti fasciste, pourquoi celui-ci reculerait-il devant la prise du pouvoir ?
Lorsque Luigi Facta se décide, trop tard, à une mesure de défense contre la prédominance fasciste en instituant à Rome l'état de siège, le roi refuse de signer le décret, et le ministère est contraint à la démission (28 octobre 1922). Ce sont les conseillers nationalistes du souverain eux-mêmes (Diaz, Federzoni) qui lui suggèrent de faire appel à Mussolini, dont les prétentions ont augmenté dans l'intervalle et qui refuse désormais de partager le pouvoir avec les vieux parlementaires.
Le 29 octobre, le roi invite Mussolini à venir le trouver de Milan pour y former le gouvernement.
LA MARCHE SUR ROME
Lancée de tous les coins d'Italie, la « marche sur Rome », que ses amis ont voulu organiser comme une démonstration de puissance, n'a plus vraiment de raison d'être. Elle se bornera dans l'après-midi du 29 octobre à une parade de quelques milliers de Chemises noires à travers les rues de la ville, en écho à celle, tout aussi spectaculaire qui avait eu lieu à Naples le 24 octobre, comme pour rendre tangible l'omniprésence du fascisme au nord et au sud de la péninsule. Le parti mussolinien compte alors plus de 400 000 membres (mais moins de 30 000 Chemises noires).
3. LA MARCHE À LA DICTATURE (1922-1926)
3.1. LES PREMIÈRES BASES DE LA DICTATURE (1922-1924)
LA FAUSSE NORMALISATION
La composition du gouvernement formé par Mussolini est le fruit d'un dosage destiné à lui rallier le maximum de suffrages. Sur treize ministres, le cabinet ne compte, en effet, que trois fascistes. À leurs côtés, on trouve quatre libéraux de diverses tendances, deux démocrates-chrétiens, un nationaliste, deux anciens chefs d'état-major de l'armée et de la marine, enfin un philosophe célèbre, Giovanni Gentile, lui-même théoricien du fascisme, au ministère de l'Instruction publique.
Mussolini est vu par les conservateurs comme l'homme du retour à l'ordre dans le pays. Au cours de cette première période, caractérisée par une reprise économique orchestrée dans un cadre libéral par le ministre des Finances De Stefani, les conservateurs obtiennent même, avec l'appui bienveillant de l'armée et de la monarchie, la mise au pas du mouvement fasciste.
Mussolini procède à la dissolution des squadre, connus pour leur violence envers les opposants, et à leur intégration dans la Milice volontaire de la sécurité nationale (MVSN) en janvier 1923. Le mouvement fasciste perd ainsi une grande partie de son autonomie.
L'INCOMPLÈTE MISE AU PAS DES OPPOSITIONS
En prenant contact avec la Chambre, celui qui n'est pas encore le Duce (le chef, le Guide) y tient pourtant un langage de dictateur, propre à effrayer plutôt qu'à convaincre, mais habilement dosé, cependant, de manière à inspirer la confiance qui, d'ailleurs, lui sera très largement accordée.
Dès 1923, l'aile droite des démocrates-chrétiens se sépare de don Sturzo, intransigeant dans son opposition à Mussolini comme à Giolitti ; elle servira de caution lors de la signature des accords du Latran avec le Vatican en 1929. Les socialistes subissent le discrédit qui accompagne toute défaite.
Les libéraux acceptent une réforme électorale, la loi Acerbo (novembre 1923), qui décapite d'avance toute opposition en accordant les deux tiers des sièges d'une circonsription à la liste électorale y disposant d'au moins 25 % des voix. Les élections du 6 avril 1924 donnent lieu à sa première application. Mais si elles assurent, comme prévu, une large majorité aux fascistes et à leurs alliés, 3 millions de suffrages vont encore aux listes minoritaires contre 4,5 millions à la liste nationale. Tous les partis d'opposition conservent leurs représentants les plus en vue, et les communistes gagnent même 5 sièges, passant de 13 à 18 élus.
3.2. L'AFFAIRE MATTEOTI (MAI 1924-JANVIER 1925)
Dès la rentrée du Parlement, le 24 mai, le secrétaire du groupe socialiste, Giacomo Matteotti, démontre, dans un discours d'une extraordinaire vigueur, pourquoi cette victoire est en réalité une défaite pour le fascisme dont il souligne l'impopularité foncière dans le pays. Ce discours exaspère les fascistes, et, le 10 juin, Matteotti est enlevé en pleine rue par cinq miliciens, assassiné et enterré dans un coin désert de la campagne romaine, où son cadavre ne sera découvert que le 16 août. Ce meurtre, incontestablement fomenté par des hauts cadres du fascisme, remue profondément l'opinion publique et déconcerte Mussolini, qui niera toujours l'avoir ordonné et fera démissionner d'office les deux membres de son entourage qu'il juge les plus compromis dans l'affaire.
Le ministère de l'Intérieur passe au nationaliste Luigi Federzoni. Mais la campagne d'opinion se poursuit dans la presse d'opposition. Elle est animée notamment par le quotidien démocrate-chrétien Il Popolo, dirigé par Giuseppe Donati, par le plus important organe de portée internationale, Il Corriere della Sera, dont le propriétaire, Luigi Albertini, mène au Sénat, avec le comte Sforza, la lutte contre le gouvernement, et enfin par le journal démocrate Il Mondo, de l'ancien ministre Giovanni Amendola.
À la fin de 1924, la situation de Mussolini paraît intenable, et on attend du roi qu'il réclame sa démission. Des personnalités monarchistes ont communiqué au souverain l'accablant mémoire de Cesare Rossi, l'un des deux hommes choisis comme boucs émissaires au début de l'affaire : la crainte de désordres plus grands encore retient Victor-Emmanuel III d'intervenir. Mussolini joue alors sa dernière carte et l'emporte.
3.3. LA MISE EN PLACE DE LA DICTATURE DE MUSSOLINI (1925-1926) ...
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Jean-François Champollion dit Champollion le Jeune |
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Jean-François Champollion
dit Champollion le Jeune
Jean-François Champollion
Égyptologue français (Figeac 1790-Paris 1832).
LA VIE ET LA CARRIÈRE
Ce fils d'un libraire de Figeac grandit au milieu des livres et fait preuve d'une extraordinaire précocité. À cinq ans, il apprend à lire seul ; à onze ans, il part pour Grenoble, où il se consacre au latin, au grec, à l'hébreu, puis au copte, et, quelques années plus tard, il communique à l'académie de cette ville le plan d'un ouvrage sur l'Égypte des Pharaons (publié en 1814). De 1807 à 1809, il est à Paris, suit des cours de perse, de sanskrit, d'arabe, se penche sur une copie de la pierre de Rosette et tente d'en déchiffrer les inscriptions. Interrompant ses études parisiennes, il va occuper à Grenoble une chaire d'histoire à la faculté, chaire qu'il conserve jusqu'en 1821 (avec une interruption de 1815 à 1818), avant de retourner à Paris. Le 7 août 1809, il présente une théorie sur l'écriture égyptienne : il découvre qu'entre les hiéroglyphes et le démotique il existe une troisième écriture, l'« hiératique », déformation cursive signe pour signe des hiéroglyphes. Outre le fac-similé de la pierre de Rosette, il dispose alors de textes nombreux, notamment de ceux qui, au retour de l'expédition de Bonaparte, ont été publiés dans les luxueux volumes de la Description de l'Égypte (1809).
En mai 1821, Champollion est capable de traduire un texte démotique en hiératique pour le transposer ensuite en hiéroglyphes. Sachant que le nom d'un souverain inscrit dans le cartouche de la pierre de Rosette est Ptolémée, il déduit que ce nom est écrit phonétiquement dans le texte : p-t-o-l-m-j-s. L'année suivante, il a sous les yeux la copie lithographiée de l'inscription hiéroglyphique de l'obélisque de Philæ découverte par un collectionneur anglais, William John Bankes : l'inscription correspond à un texte grec gravé sur le socle. Il vérifie que le nom de Cléopâtre est écrit exactement tel qu'il l'a reconstitué à partir du démotique. Les deux cartouches « Ptolémée » et « Cléopâtre » lui fournissent ainsi douze lettres hiéroglyphiques différentes, base solide pour tout déchiffrement et qui lui permettra de reconnaître Alexandre, Tibère, Germanicus, Trajan. Le 14 septembre 1822, il examine les dessins d'hiéroglyphes que vient de lui envoyer d'Égypte l'architecte français Jean Nicolas Huyot : il y lit avec émotion non plus les noms de rois grecs ou d'empereurs romains de l'époque tardive, mais les noms de Ramsès (R-m-s-s) et de Thoutmôsis (Thot-m-s).
Champollion consigne ses résultats dans la fameuse Lettre à M. Dacier relative à l'alphabet des hiéroglyphes phonétiques, présentée à l'Académie des inscriptions et belles-lettres à la fin septembre 1822 : selon lui, l'élément phonétique constitue, à côté des signes idéographiques, la base de tout le système de l'écriture égyptienne. En 1824, son Précis du système hiéroglyphique précise les données de la Lettre, donne la lecture de nombreux autres noms, traduit des fragments entiers. De 1824 à 1826, Champollion visite les collections égyptologiques d'Italie, dont celle de Turin. En 1826, il est nommé conservateur du département égyptien du Louvre, puis, de 1828 à 1830, il parcourt la vallée du Nil et relève les inscriptions des monuments. Professeur d'égyptologie au Collège de France en 1831, il meurt le 4 mars 1832 d'une attaque d'apoplexie.
Son frère aîné, Jacques (Figeac 1778-Fontainebleau 1867), publia après sa mort ses Lettres écrites d'Égypte et de Nubie (1833), ses Monuments de l'Égypte et de la Nubie (1835-1845), sa Grammaire égyptienne (1835-1841), « carte de visite pour l'éternité », suivant le mot de Champollion lui-même, et le Dictionnaire égyptien en écriture hiéroglyphique (1841-1843).
LA PIERRE DE ROSETTE
Cette stèle de basalte noir, de 114 cm de hauteur sur 72 cm de largeur, fut découverte pendant l'expédition d'Égypte, au cours de l'été 1799, par un soldat de l'officier du génie Bouchard lors de travaux au vieux fort de Rosette (en arabe Rachīd, à 70 km à l'est d'Alexandrie), appelé plus tard fort Julien. Elle porte trois inscriptions : l'une, mutilée, est en hiéroglyphes ; la deuxième est en caractères démotiques ; la troisième, écrite en grec, se termine par une ligne qui indique qu'il s'agit d'un seul et même décret, pris au printemps de l'an 196 avant J.-C. par une assemblée de prêtres égyptiens réunis à Memphis, en l'honneur du roi Ptolémée V Épiphane.
Le 15 septembre 1799, le Courrier de l'Égypte, № 37, décrit la pierre et signale qu'elle donnera peut-être la clef des hiéroglyphes. Elle est transportée à l'Institut d'Égypte du Caire, où l'on fait des copies des inscriptions à destination de la France. Un peu plus tard, elle est installée à Alexandrie, chez le général de Menou, mais, lorsque celui-ci capitule (1801), la pierre est saisie par les Anglais et envoyée au British Museum, où elle se trouve actuellement.
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L'ÉCRITURE |
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écriture
(latin scriptura)
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Cet article fait partie du dossier consacré à la Mésopotamie.
Système de signes graphiques servant à noter un message oral afin de pouvoir le conserver et/ou le transmettre.
HISTOIRE
Toutes les civilisations qui ont donné naissance à une forme d'écriture ont forgé une version mythique de ses origines ; elles en ont attribué l'invention aux rois ou aux dieux. Mais les premières manifestations de chaque écriture témoignent d'une émergence lente et de longs tâtonnements. Dans ces documents, les hommes ont enregistré : des listes d'impôts et des recensements ; des traités et des lois, des correspondances entre souverains ou États ; des biographies de personnages importants ; des textes religieux et divinatoires. Ainsi l'écriture a-t-elle d'abord servi à noter les textes du pouvoir, économique, politique ou religieux. Par ailleurs, les premiers systèmes d'écriture étaient compliqués. Leur apprentissage était long et réservé à une élite sociale voulant naturellement défendre ce statut privilégié et qui ne pouvait guère être favorable à des simplifications tendant à faciliter l'accès à l'écriture, instrument de leur pouvoir.
À partir du IIIe millénaire avant J.-C., toutes les grandes cultures du Proche-Orient ont inventé ou emprunté un système d'écriture. Les systèmes les plus connus, et qui ont bénéficié de la plus grande extension dans le monde antique, demeurent ceux de l'écriture hiéroglyphique égyptienne et de l'écriture cunéiforme, propre à la Mésopotamie. L'écriture égyptienne est utilisée dans la vallée du Nil, jusqu'au Soudan, sur la côte cananéenne et dans le Sinaï. Mais, pendant près d'un millénaire, l'écriture cunéiforme est, avec la langue sémitique (l'assyro-babylonien) qu'elle sert à noter, le premier moyen de communication international de l'histoire. L'Élam (au sud-ouest de l'Iran), les mondes hittite (en Anatolie) et hourrite (en Syrie du Nord), le monde cananéen (en Phénicie et en Palestine) ont utilisé la langue et l'écriture mésopotamienne pour leurs échanges diplomatiques et commerciaux, mais aussi pour rédiger et diffuser leurs propres œuvres littéraires et religieuses. Pour leur correspondance diplomatique, les pharaons du Nouvel Empire avaient eux-mêmes des scribes experts dans la lecture des textes cunéiformes.
À la même époque, d'autres systèmes d'écriture sont apparus, mais leur extension est limitée : en Anatolie, le monde hittite utilise une écriture hiéroglyphique qui ne doit rien à l'Égypte. Dans le monde égéen, les scribes crétois inventent une écriture hiéroglyphique, puis linéaire, de 80 signes environ, reprise par les Mycéniens.
Au Ier millénaire, l'apparition de l'alphabet marque une histoire décisive dans l'histoire de l'écriture. Depuis des siècles, l'Égypte dispose, au sein de son écriture nationale, du moyen de noter les consonnes. Au xive siècle avant J.-C., les scribes d'Ougarit gravent sur des tablettes d'argile des signes cunéiformes simplifiés et peu nombreux, puisqu'ils ne sont que 30, correspondant à la notation de 27 consonnes et de 3 valeurs vocaliques. Mais les uns et les autres ne font pas école. Ce n'est qu'après le xie siècle que le système d'écriture alphabétique se généralise à partir de la côte phénicienne. Une révolution sociale accompagne cette innovation radicale : les scribes, longuement formés dans les écoles du palais et des temples, voient leur rôle et leur importance diminuer.
LE SYSTÈME CUNÉIFORME
Le premier système d'écriture connu apparaît dans la seconde moitié du IVe millénaire avant notre ère, en basse Mésopotamie, pour transcrire le sumérien. Dans l'ancienne Mésopotamie, les premiers signes d'écriture sont apparus pour répondre à des besoins très concrets : dénombrer des biens, distribuer des rations, etc. Comme tous les systèmes d'écriture, celui-ci apparaît donc d'abord sous forme de caractères pictographiques, dessins schématisés représentant un objet ou une action. Le génie de la civilisation sumérienne a été, en quelques siècles, de passer du simple pictogramme à la représentation d'une idée ou d'un son : le signe qui reproduit à l'origine l'apparence de la flèche (ti en sumérien) prend la valeur phonétique ti et la signification abstraite de « la vie », en même temps que sa graphie se stylise et, en s'amplifiant, ne garde plus rien du dessin primitif.
LES PICTOGRAMMES DE L'ÉCRITURE CUNÉIFORME
Trouvées sur le site d'Ourouk IV, de petites tablettes d'argile portent, tracés avec la pointe d'un roseau, des pictogrammes à lignes courbes, au nombre d'un millier, chaque caractère représentant, avec une schématisation plus ou moins grande et sans référence à une forme linguistique, un objet ou un être vivant. L'ensemble de ces signes, qui dépasse le millier, évolue ensuite sur deux plans. Sur le plan technique, les pictogrammes connaissent d'abord une rotation de 90° vers la gauche (sans doute parce que la commodité de la manipulation a entraîné une modification dans l'orientation de la tablette tenue en main par le scribe) ; ultérieurement, ces signes ne sont plus tracés à la pointe sur l'argile, mais imprimés, dans la même matière, à l'aide d'un roseau biseauté, ce qui produit une empreinte triangulaire en forme de « clou » ou de « coin », cuneus en latin, d'où le nom de cunéiforme donné à cette écriture.
LE SENS DES PICTOGRAMMES CUNÉIFORMES
Sur le plan logique, l'évolution est plus difficile à cerner. On observe cependant, dès l'époque primitive, un certain nombre de procédés notables. Ainsi, beaucoup de ces signes couvrent une somme variable d'acceptions : l'étoile peut tour à tour évoquer, outre un astre, « ce qui est en haut », le « ciel » et même un « être divin ». Par ailleurs, les sumériens ne se sont pas contenté de représenter un objet ou un être par un dessin figuratif : ils ont également noté des notions abstraites au moyen de symboles. C'est ainsi que deux traits sont parallèles ou croisés selon qu'ils désignent un ami ou un ennemi.
Le sens peut aussi procéder de la combinaison de deux éléments graphiques. Par exemple, en combinant le signe de la femme et celui du massif montagneux, on obtient le sens d'« étrangère », « esclave ».
Tous ces signes, appelés pictogrammes par référence à leur tracé, sont donc aussi des idéogrammes, terme qui insiste sur leur rôle sémantique (leur sens) et indique de surcroît leur insertion dans un système. L'écriture cunéiforme dépasse ensuite ce stade purement idéographique. Un signe dessiné peut aussi évoquer le nom d'une chose, et non plus seulement la chose elle-même. On recourt alors au procédé du rébus, fondé sur le principe de l'homophonie (qui ont le même son). Ce procédé permet de noter tous les mots et ainsi des messages plus élaborés.
L'ÉCRITURE DES AKKADIENS
Cependant, les Sumériens considèrent les capacités phonétiques des signes, nouvellement découvertes, comme de simples appoints à l'idéographie originelle, et font alterner arbitrairement les deux registres, idéographique et phonographique. Lorsque les Akkadiens empruntent ce système vers − 2300, ils l'adaptent à leur propre langue, qui est sémitique, et font un plus grand usage du phonétisme, car, à la différence du sumérien, dont les vocables peuvent se figurer par des idéogrammes toujours identiques, flanqués d'affixes qui déterminent leur rôle grammatical, l'akkadien renferme déclinaisons et conjugaisons.
L'ÉVOLUTION DU SUMÉRO-AKKADIEN
L'écriture suméro-akkadienne ne cesse d'évoluer et connaît notamment une expansion importante au IIe millénaire. Le cunéiforme est adopté par des peuples de l'Orient qui l’adaptent à la phonétique de leur langue : Éblaïtes, Susiens, Élamites, etc. Vers − 1500, les Hittites adoptent les cunéiformes babyloniens pour noter leur langue, qui est indo-européenne, associant leurs idéogrammes à ceux venus de Mésopotamie, qu'ils prononcent en hittite. L'ougaritique, connu grâce aux fouilles de Ras Shamra (l'antique Ougarit), dans l'actuelle Syrie, est un alphabet à technique cunéiforme ; il note plusieurs langues et révèle que, à partir de − 1400 environ, l'écriture en cunéiformes est devenue une sorte de forme « véhiculaire », simplifiée, servant aux échanges internationaux. Au Ier millénaire encore, le royaume d'Ourartou (situé à l'est de l'Anatolie) emprunte les caractères cunéiformes (vers − 800) et ne les modifie que légèrement. Enfin, pendant une période assez brève (vie-ive s. avant notre ère), on utilise un alphabet à technique cunéiforme pour noter le vieux perse. Au Ier millénaire, devant les progrès de l'alphabet et de la langue des Araméens (araméen), l'akkadien devient une langue morte ; le cunéiforme ne se maintient que dans un petit nombre de villes saintes de basse Mésopotamie, où il est utilisé par des Chaldéens, prêtres et devins, jusqu'au ier s. après J.-C., avant de sombrer dans l'oubli.
DU HIÉROGLYPHE AU DÉMOTIQUE
Hiéroglyphes
Tout d'abord hiéroglyphique, l'écriture égyptienne évolue en se simplifiant vers une écriture plus maniable, et d'un usage quotidien. Le hiéroglyphe est une unité graphique utilisée dans certaines écritures de l'Antiquité, comme l'égyptien. Les premiers témoignages « hiéroglyphiques » suivent de quelques siècles les plus anciennes tablettes sumériennes écrites en caractères cunéiformes. Le mot « hiéroglyphe », créé par les anciens Grecs, fait état du caractère « sacré » (hieros) et « gravé » (gluphein) de l'écriture égyptienne monumentale, mais n'est réservé à aucun système d'écriture particulier. On désigne par le même terme les écritures crétoises du minoen moyen (entre 2100 et 1580 avant J.-C.), que l'on rapproche ainsi des signes égyptiens, mais qui demeurent indéchiffrées.
LES HIÉROGLYPHES ÉGYPTIENS
La langue égyptienne est une langue chamito-sémitique dont la forme écrite n'est pas vocalisée. Vers 3000 avant J.-C., l'Égypte possède l'essentiel du système d'écriture qu'elle va utiliser pendant trois millénaires et dont les signes hiéroglyphiques offrent la manifestation la plus spectaculaire. Quelque 700 signes sont ainsi créés, beaucoup identifiables parce que ce sont des dessins représentant des animaux, un œil, le soleil, un outil, etc.
Cette écriture est d'abord pictographique (un signe, dessiné, représente une chose ou une action). Mais dès l'origine, l'écriture égyptienne eut recours, à côté des signes-mots (idéogrammes), à des signes ayant une valeur phonétique (phonogrammes), où un signe représente un son. Le dessin du canard représente l'animal lui-même, mais canard se disant sa, le même signe peut évoquer le son sa, qui sert aussi à désigner le mot « fils ». Pour éviter au lecteur confusions ou hésitations, le scribe a soin de jalonner son texte de repères : signalisation pour désigner l'emploi du signe comme idéogramme (signe-chose, représentant plus ou moins le sens du mot) ou phonogramme, et compléments phonétiques qui indiquent la valeur syllabique. Il existe également des idéogrammes déterminatifs, qui ne se lisent pas, mais qui indiquent à quelle catégorie appartient le mot. Les signes peuvent être écrits de gauche à droite ou de droite à gauche.
On distingue trois types d'écriture égyptienne : l'écriture cursive ou hiératique, tracée sur papyrus, l'écriture démotique, plus simplifiée que l'écriture hiératique, et l'écriture hiéroglyphique proprement dite, c'est-à-dire celle des monuments, antérieure à 2500 avant J.-C. Ces hiéroglyphes, gravés à l'origine dans la pierre, en relief ou en creux, peuvent être disposés verticalement ou horizontalement, comme ils peuvent se lire de droite à gauche ou de gauche à droite, le sens de la lecture étant indiqué par la direction du regard des êtres humains et des animaux, toujours tourné vers le début du texte.
L'écriture hiéroglyphique apparaît toute constituée dès les débuts de l'histoire (vers 3200 avant J.-C.) ; la dernière inscription en hiéroglyphes, trouvée à Philae, date de 394 après J.-C.
LE SYSTÈME DE L'ÉCRITURE ÉGYPTIENNE
Les idéogrammes peuvent être des représentations directes ou indirectes, grâce à divers procédés logiques :
– la représentation directe de l'objet que l'ont veut noter ;
– la représentation par synecdoque ou métonymie, c'est-à-dire en notant la partie pour le tout, l'effet pour la cause, ou inversement : ainsi, la tête de bœuf représente cet animal ; deux yeux humains, l'action de voir ;
– la représentation par métaphore : on note, par exemple, la « sublimité » par un épervier, car son vol est élevé ; la « contemplation » ou la « vision », par l'œil de l'épervier, parce qu'on attribuait à cet oiseau la faculté de fixer ses regards sur le disque du Soleil ;
– représentation par « énigme » – le terme est de Champollion – ; on emploie, pour exprimer une idée, l'image d'un objet physique n'ayant qu'un rapport lointain avec l'objet même de l'idée à noter : ainsi, une plume d'autruche signifie la « justice », parce que, disait-on, toutes les plumes des ailes de cet oiseau sont parfaitement égales ; un rameau de palmier représente l'« année », parce que cet arbre était supposé avoir autant de rameaux par an que l'année compte de mois, etc.
L'ÉVOLUTION DE L'ÉCRITURE ÉGYPTIENNE
L'évolution des hiéroglyphes vers le phonétisme
À partir des idéogrammes originels, l'écriture égyptienne a évolué vers un phonétisme plus marqué que celui du cunéiforme. Selon le principe du rébus là aussi, on a utilisé, pour noter telle notion abstraite difficile à figurer, l'idéogramme d'un objet dont le nom a une prononciation identique ou très proche. Par exemple, le scarabée, khéper, a servi à noter la notion qui se disait également khéper, le « devenir ».
Poussé plus loin, le recours au phonétisme mène à l'acronymie. Un acronyme est en l'occurrence une sorte de sigle formé de toute consonne initiale de syllabe. Apparaissent ainsi des acronymes trilitères et bilitères (nfr, « cœur » ; gm, « ibis »), ainsi que des acronymes unilitères (r, « bouche »), qui constituent une espèce d'alphabet consonantique de plus de vingt éléments.
Mais le fait de noter exclusivement les consonnes entraîne beaucoup trop d'homonymies. Pour y remédier, on utilise certains hiéroglyphes comme déterminatifs sémantiques destinés à guider l'interprétation sémantique des mots écrits phonétiquement. Par exemple, le signe du « Soleil », associé à la « massue », hd, et au « cobra », dj, qui jouent un rôle phonétique, mène à la lecture hedj, « briller ».C'est dans la catégorie des déterminatifs qu'entre le cartouche, encadrement ovale signalant un nom de souverain. Quelle que soit sa logique, cette écriture est d'un apprentissage et d'une lecture difficiles, et se prête peu à une graphie rapide.
L'écriture hiératique
Sur le plan technique, si la gravure dans la pierre s'accommode de ces formes précises, l'utilisation du roseau ou du pinceau sur du papyrus ou de la peau entraîne une écriture plus souple. Les hiéroglyphes sont simplifiés pour aboutir à deux formes cursives : l'écriture hiératique (usitée par les prêtres) et l'écriture démotique (servant à la rédaction de lettres et de textes courants). Tracée sur papyrus à l'aide d'un roseau à la pointe écrasée, trempée dans l'encre noire ou rouge, l'écriture hiératique est établie par simplification et stylisation des signes hiéroglyphiques. Avec ses ligatures, ses abréviations, elle sert aux besoins de la vie quotidienne : justice, administration, correspondance privée, inventaires mais aussi littérature, textes religieux, scientifiques, etc.
Le démotique
Vers 700 avant J.-C., une nouvelle cursive, plus simplifiée, remplace l'écriture hiératique. Les Grecs lui donnent le nom de « démotique », c'est-à-dire « (écriture) populaire », car elle est d'un usage courant et permet de noter les nouvelles formes de la langue parlée. Utilisée elle aussi sur papyrus ou sur ostraca (tessons de poterie), cette écriture démotique suffit à tous les usages pendant plus de 1000 ans, exception faite des textes gravés sur les monuments, qui demeurent l'affaire de l'hiéroglyphe, et des textes religieux sur papyrus pour lesquels on garde l'emploi de l'écriture hiératique.
Sur le plan fonctionnel, les Égyptiens, tout comme les Sumériens, n'ont pas exploité pleinement leurs acquis et se sont arrêtés sur le chemin qui aurait pu les mener à une écriture alphabétique. Demeuré longtemps indéchiffrable, le système d’écriture égyptien fut décomposé et analysé par Champollion (1822) grâce à la découverte de la pierre de Rosette, qui portait le même texte en hiéroglyphe, en démotique et en grec.
LES ÉCRITURES ANCIENNES DÉCHIFFRÉES
Alliant érudition, passion et intuition, les chercheurs du xixe s. déchiffrent les écritures des civilisations mésopotamiennes et égyptiennes.
Dans leurs travaux, ils durent résoudre deux problèmes : celui de l'écriture proprement dite, d'une part ; celui de la langue pour laquelle un système d'écriture était employé, d'autre part. Le document indispensable fut donc celui qui utilisait au moins deux systèmes d'écriture (ou davantage) dont l'un était déjà connu : la pierre de Rosette, rédigé en 2 langues et trois systèmes d’écritures (hiéroglyphe, démotique et grec) permit de déchiffrer les hiéroglyphes, grâce à la connaissance du grec ancien. Les savants durent ensuite faire l'hypothèse que telle ou telle langue avait été utilisée pour rédiger un texte donné ; Jean-François Champollion postula ainsi que la langue égyptienne antique a survécu dans la langue copte, elle-même conservée dans la liturgie de l'église chrétienne d'Égypte. De même le déchiffreur de l’écriture cunéiforme, sir Henry Creswicke Rawlinson, une fois les textes en élamite et vieux-perse de Béhistoun mis au point, fit l'hypothèse, avec d'autres chercheurs, que le texte restant était du babylonien, et qu'il s'agissait d'une langue sémitique dont les structures pouvaient être retrouvées à partir de l'arabe et de l'hébreu.
LES DÉCHIFFREURS
1754 : l'abbé Barthélemy propose une lecture définitive des textes phéniciens et palmyriens.
1799 (2 août) : mise au jour de la pierre de Rosette, dans le delta du Nil, portant copie d'un décret de Ptolémée V Épiphane (196 avant J.-C.) rédigé en trois écritures, hiéroglyphique, hiératique et grecque.
1822 : Lettre à Monsieur Dacier, de J.-F. Champollion, où ce dernier expose le principe de l'écriture égyptienne.
1824 : parution du Précis du système hiéroglyphique rédigé par Champollion.
À partir de 1835 : l'Anglais H. C. Rawlinson copie, à Béhistoun, en Iran, une inscription célébrant les exploits de Darius Ier (516 avant J.-C.) rédigée selon trois systèmes d'écriture cunéiforme, en vieux-perse, en élamite et en babylonien (akkadien), langues jusqu'alors inconnues.
1845 : le texte en vieux-perse est déchiffré par Rawlinson.
1853 : le texte en élamite est déchiffré par E. Norris.
1857 : un même texte babylonien est confié à quatre savants qui en proposent des traductions identiques.
1858 : Jules Oppert publie son Expédition scientifique en Mésopotamie, qui contribue au déchiffrement du cunéiforme.
1905 : F. Thureau-Dangin établit l'originalité de l'écriture et du système linguistique des Sumériens.
1917 : le Tchèque Hrozny établit que les textes hittites, écrits en caractères cunéiformes, servent à noter une langue indo-européenne, désormais déchiffrée.
1945 : découverte d'une stèle bilingue à Karatépé, en Cilicie ; la version phénicienne du texte permet de déchiffrer un texte louwite (proche du hittite) noté en écriture hiéroglyphique.
1953 : les Anglais M. Ventris et J. Chadwick établissent que les textes rédigés en écriture dite « linéaire B » sont du grec archaïque (mycénien) ; le linéaire B est une écriture syllabique comprenant environ 90 signes.
LA « LANGUE GRAPHIQUE » DES CHINOIS
Après les écritures sumérienne et égyptienne, l'écriture chinoise est la troisième écriture importante à avoir découpé les messages en mots. Mais elle n'a pas évolué comme les deux autres, car, à la différence de tous les systèmes d'écriture, qui sont parvenus, à des degrés divers, à exprimer la pensée par la transcription du langage oral, l'écriture chinoise note une langue conçue en vue de l'expression écrite exclusivement, et appelée pour cette raison « langue graphique ».
L'ÉVOLUTION DES IDÉOGRAMMES CHINOIS
Les premiers témoignages de l’écriture chonoise datent du milieu du IIe millénaire avant J.-C. : ce sont des inscriptions divinatoires, gravées sur des carapaces de tortues ou des omoplates de bœufs. Les devins y gravaient les questions de leurs « clients » puis portaient contre ce support un fer chauffé à blanc et interprétaient les craquelures ainsi produites. Ce type d’écriture a évolué à travers le temps et les différents supports : inscriptions sur des vases de bronze rituels aux alentours du ixe s. ; écriture sigillaire, gravée dans la pierre ou l'ivoire, au milieu du Ier millénaire ; caractères « classiques », peints au pinceau, à partir du iie s. avant J.-C. Ces derniers signes ont traversé deux millénaires ; en 1957, une réforme en a simplifié un certain nombre.
LE FONCTIONNEMENT DE L'ÉCRITURE CHINOISE
Écriture chinoise
Sur le plan fonctionnel, les pictogrammes originels ont évolué vers un système d'écriture où les éléments sont dérivés les uns des autres. Soit le caractère de l'arbre (mu) : on peut en cocher la partie basse pour noter « racine » (ben), ou la partie haute pour « bout, extrémité » (mo) ; on peut aussi lui adjoindre un deuxième arbre pour noter « forêt » (lin), un troisième pour noter « grande forêt », et ultérieurement « nombreux », « sombre » (sen).
Un dérivé peut servir à son tour de base de dérivation. Ainsi, le pictogramme de la « servante », de l'« esclave », figurant une femme et une main droite (symbole du mari et du maître), est associé au signe du cœur, siège des sentiments, pour signifier la « rage », la « fureur », éprouvée par l'esclave.
Cette langue graphique use également d'indicateurs phonétiques. Ainsi, le caractère de la femme, flanqué de l'indicateur « cheval » (mâ), note « la femme qui se prononce comme le cheval » (au ton près), c'est-à-dire la « mère » (m"a) ; si l'on associe « cheval » avec « bouche », on note la particule interrogative (ma) ; avec deux « bouches », le verbe « injurier ».
Inversement, le caractère chinois peut être lu grâce au déterminatif sémantique. Ces déterminatifs, ou clés (au nombre de 540 au iie s. après J.-C., réduits à 214 au xviie s., et portés à 227, avec des modifications diverses, en 1976), sont des concepts destinés à orienter l'esprit du lecteur vers telle ou telle catégorie sémantique. Le même signe signifiera « rivière » s'il est précédé de la clé « eau », et « interroger » s'il est précédé de la clé « parole ».
Le système chinois repose donc sur le découpage de l'énoncé en mots. Il semble que, de l'autre côté du Pacifique, et au xvie s. de notre ère seulement, à la veille de la conquête espagnole, les glyphes précolombiens (que nous déchiffrons très partiellement à ce jour, malgré des progrès dans la lecture des glyphes mayas) présentent des similitudes avec cette écriture. Mais ils ne se sont pas entièrement dégagés de la simple pictographie.
L'AVENTURE DURABLE DE L'ALPHABET
LA NAISSANCE DE L'ALPHABET
L'invention de l'alphabet (dont le nom est forgé par les Grecs sur leurs deux premières lettres alpha et bêta) se situe au IIe millénaire avant notre ère en Phénicie. Deux peuples y jouent un rôle important, les Cananéens et, à partir du xiie s. avant J.-C., les Araméens ; ils parlent chacun une langue sémitique propre et utilisent l'akkadien, écrit en cunéiformes, comme langue véhiculaire. Dans les langues sémitiques, chacun des « mots » est formé d'une racine consonantique qui « porte » le sens, tandis que les voyelles et certaines modifications consonantiques précisent le sens et indiquent la fonction grammaticale. Cette structure n'est sans doute pas étrangère à l'évolution de ces langues vers le principe alphabétique, et plus précisément vers l'alphabet consonantique, à partir du système cunéiforme.
L'ALPHABET OUGARITIQUE
Le premier alphabet dont on ait pu donner une interprétation précise est l'alphabet ougaritique, apparu au moins quatorze siècles avant notre ère. Différent du cunéiforme mésopotamien, qui notait des idées (cunéiformes idéographiques), puis des syllabes (cunéiformes syllabiques), il note des sons isolés, en l'occurrence des consonnes, au nombre de vingt-huit. Il a probablement emprunté la technique des cunéiformes aux Akkadiens, en pratiquant l'acrophonie (phénomène par lequel les idéogrammes d'une écriture ancienne deviennent des signes phonétiques correspondant à l'initiale du nom de l'objet qu'ils désignaient. Ainsi, en sumérien, le caractère cunéiforme signifiant étoile, et qui se lisait ana, finit par devenir le signe de la syllabe an) et en simplifiant certains caractères. La véritable innovation est celle des scribes d'Ougarit : gravés dans l'argile, comme les signes mésopotamiens, les caractères d'apparence cunéiforme sont en fait des lettres, déjà rangées dans l'ordre des futurs alphabets. C'est en cette écriture que les trésors de la littérature religieuse d'Ougarit, c'est-à-dire la littérature religieuse du monde cananéen lui-même, nous sont parvenus.
L'ALPHABET DE BYBLOS
Alors que l'« alphabet » ougaritique demeure réservé à cette cité, l'alphabet sémitique dit « ancien » est l'ancêtre direct de notre alphabet. Sa première manifestation en est, au xie s., le texte gravé sur le sarcophage d'Ahiram, roi de Byblos : 22 signes à valeur uniquement de consonnes. Cet alphabet apparaît donc à Byblos (aujourd'hui Djebaïl, au Liban), lieu d'échanges entre l'Égypte et le monde cananéen. Ce système est utilisé successivement par les Araméens, les Hébreux et les Phéniciens. Commerçants et navigateurs, ces derniers le diffusent au cours de leurs voyages, notamment vers l'Occident, vers Chypre et l'Égée, où les Grecs s'en inspirent pour la création de leur propre alphabet. Car ce sont les Grecs qui, au xie s. avant J.-C., emploient, pour la première fois au monde, un système qui note aussi bien les voyelles que les consonnes, constituant ainsi le premier véritable alphabet.
Pour les deux alphabets d'Ougarit et de Byblos, entre lesquels il ne devrait pas y avoir de continuité globale, il est frappant que l'ordre des lettres soit le même et corresponde à peu près à celui des alphabets ultérieurs. Cet ordre, dont l'origine reste mystérieuse, serait très ancien.
LA FORME ET LE NOM DES LETTRES
Mais quel critère a déterminé le choix de tel graphisme pour noter tel son ? D'où viennent les noms des lettres ? L'hypothèse retenue répond à ces deux questions à la fois : une lettre devait fonctionner à l'origine comme un pictogramme (A figurait une tête de bœuf) ; on a utilisé ce pictogramme pour noter le son initial du nom qui désignait telle chose ou tel être dans la langue (A utilisé pour noter « a », issu par acrophonie d'aleph, nom du bœuf en sémitique) ; enfin, on a donné à la lettre alphabétique nouvelle le nom de la chose que figurait le pictogramme originel (aleph est le nom de la lettre A). C'est sur cette hypothèse que s'est fondé l'égyptologue Alan Henderson Gardiner dans ses travaux sur les inscriptions dites « protosinaïtiques » découvertes dans le Sinaï. Elles sont antérieures au xve s. avant J.-C., présentent quelque signes pictographiques et notent une langue apparentée au cananéen. Les conclusions de Gardiner ne portent que sur quelques « lettres » de ce protoalphabet, mais elles semblent convaincantes et devraient permettre de repousser de cinq à sept siècles la naissance du système alphabétique.
LA CHAÎNE DES PREMIERS ALPHABETS
Des convergences dans la forme, le nom et la valeur phonétique des lettres établissent, entre les alphabets, une parenté incontestable. Pour l'araméen et le grec, celle-ci est collatérale : ils ont pour ancêtre commun le phénicien. De l'alphabet araméen dérivent l'hébraïque (iiie ou iie s. avant J.-C.) et probablement l'arabe (avant le vie s. après J.-C.), avec ses diverses adaptations, qui notent le persan ou l'ourdou, par exemple ; à moins qu'il ne faille distinguer une filière arabique qui aurait une parenté collatérale avec le phénicien. Du grec découle la grande majorité des alphabets actuels : étrusque (ve s. avant J.-C.), italiques puis latin (à partir du ve s. avant J.-C.), copte (iie-iiie s. après J.-C.), gotique (ive s.), arménien (ve s.), glagolitique et cyrillique (ixe s.). La propagation du christianisme joua un rôle majeur dans cette filiation : c'est pour les besoins de leur apostolat que des évangélisateurs, s'inspirant des alphabets grec ou latin dans lesquels ils lisaient les Écritures, constituèrent des alphabets adaptés aux langues des païens.
Quant aux alphabets asiatiques, au nombre d'au moins deux cents, on pense qu'ils remontent tous à l'écriture brahmi. La devanagari, par exemple, a servi à noter le sanskrit et note aujourd'hui le hindi. D’aucuns supposent que l'écriture brahmi aurait été elle-même créée d'après un modèle araméen. Selon cette hypothèse, tous les alphabets du monde proviendraient donc de la même source proche-orientale.
L'ALPHABET AUJOURD’HUI
Avec la grande extension de l'alphabet, la fonction de l'écrit a évolué. À la conservation de la parole, ou, sur une autre échelle, de la mémoire des hommes, s'est ajoutée l'éducation, l'œuvre de culture, souvent synonyme d'« alphabétisation ». Il existe bel et bien une civilisation de l'alphabet, accomplissement de celle de l'écriture, où un autodafé de documents écrits est considéré comme un acte de barbarie. Depuis le siècle dernier, une étape importante s'est amorcée avec la diffusion de l'alphabet latin hors de l'Europe occidentale, surtout pour noter des parlers encore non écrits, en Afrique ou dans l'ex-Union soviétique. En Turquie, par exemple, la réforme de 1928 (utilisation de l’alphabet latin, légèrement enrichi de diacritiques et d’une lettre supplémentaire) a permis de rapprocher le pays de la civilisation occidentale.
LINGUISTIQUE
L'écriture est un code de communication secondaire par rapport au langage articulé. Mais, contrairement à celui-ci, qui se déroule dans le temps, l'écriture possède un support spatial qui lui permet d'être conservée. La forme de l'écriture dépend d'ailleurs de la nature de ce support : elle peut être gravée sur la pierre, les tablettes d'argile ou de cire, peinte ou tracée sur le papyrus, le parchemin ou le papier, imprimée ou enfin affichée.
Selon la nature de ce qui est fixé sur le support, on distingue trois grands types d'écriture, dont l'apparition se succède en gros sur le plan historique, et qui peuvent être considérés comme des progrès successifs dans la mesure où le code utilisé est de plus en plus performant : les écritures synthétiques (dites aussi mythographiques), où le signe est la traduction d'une phrase ou d'un énoncé complet ; les écritures analytiques, où le signe dénote un morphème ; les écritures phonétiques (ou phonématiques), où le signe dénote un phonème ou une suite de phonèmes (syllabe).
LES ÉCRITURES SYNTHÉTIQUES
On peut classer dans les écritures synthétiques toutes sortes de manifestations d'une volonté de communication spatiale. Certains, d'ailleurs, préfèrent parler en ce cas de « pré-écriture », dans la mesure où ces procédés sont une transcription de la pensée et non du langage articulé. Quoi qu'il en soit, le spécialiste de la préhistoire André Leroi-Gourhan note des exemples de telles manifestations dès le moustérien évolué (50 000 ans avant notre ère) sous la forme d'incisions régulièrement espacées sur des os ou des pierres. À ce type de communication appartiennent les représentations symboliques grâce à des objets, dont un exemple classique, rapporté par Hérodote, est le message des Scythes à Darios ; il consistait en cinq flèches d'une part, une souris, une grenouille et un oiseau d'autre part, formes suggérées à l'ennemi pour échapper aux flèches. Ce genre de communication se retrouve un peu partout dans le monde dans les sociétés dites primitives. On peut ainsi signaler les systèmes de notation par nœuds sur des cordelettes (quipus des archives royales des Incas), mais la forme la plus courante d'écriture synthétique est la pictographie, c'est-à-dire l'utilisation de dessins figuratifs (pictogrammes), dont chacun équivaut à une phrase (« je pars en canot », « j'ai tué un animal », « je rentre chez moi », etc.) : c'est le système utilisé par les Inuits d'Alaska, les Iroquois et les Algonquins (wampums) ou encore par les Dakotas. Les limites de ces modes d'expression apparaissent évidentes : ils ne couvrent que des secteurs limités de l'expérience, ils ne constituent pas, comme le langage, une combinatoire.
LES ÉCRITURES ANALYTIQUES
Dans les écritures analytiques (dites aussi, paradoxalement, « idéographiques »), le signe ne représente pas une idée mais un élément linguistique (mot ou morphème), ce n'est plus une simple suggestion, c'est une notation. En réalité, le manque d'économie de ce système (il y aurait un signe pour chaque signifié) fait qu'il n'existe pas à l'état pur : toutes les écritures dites idéographiques comportent, à côté des signes-choses (idéogrammes), une quantité importante de signes à valeur phonétique, qu'il s'agisse des cunéiformes suméro-akkadiens, des hiéroglyphes égyptiens ou de l'écriture chinoise. Par exemple, en chinois, on peut distinguer, en gros, cinq types d'idéogrammes : les caractères représentant des objets, et qui sont, à l'origine, d'anciens pictogrammes (le soleil, la lune, un cheval, un arbre, etc.) ; les caractères évoquant des notions abstraites (monter, descendre, haut, bas) ; les caractères qui sont des agrégats logiques, formés par le procédé du rébus, en associant deux signes déjà signifiants (une femme sous un toit pourra dénoter la paix) ; les caractères utilisés pour noter des homophones : tel caractère désignant à l'origine un objet donné sera utilisé pour noter un mot de même prononciation mais de sens complètement différent ; les caractères qui sont des composés phonétiques, constitués, à gauche, d'un élément qui indique la catégorie sémantique (clef) et, à droite, d'un élément indiquant la prononciation (ce dernier type de caractère constitue jusqu'à 90 % des entrées d'un dictionnaire chinois). Cependant, l'écriture chinoise, malgré ses recours au phonétisme, n'est pas liée à la prononciation : elle peut être lue par les locuteurs des différents dialectes chinois, entre lesquels il n'y a pas d'intercompréhension orale ; elle sert, d'autre part, à noter des langues complètement différentes comme le lolo, l’ancien coréen (qui a depuis créé son propre alphabet, le hangul) ou le japonais, où les idéogrammes chinois coexistent avec une notation syllabique.
LES ÉCRITURES PHONÉTIQUES
Les écritures dites « phonétiques » témoignent d'une prise de conscience plus poussée de la nature de la langue parlée : les signes y ont perdu tout contenu sémantique (même si, à l'origine, les lettres sont d'anciens idéogrammes), ils ne sont plus que la représentation d'un son ou d'un groupe de sons. Trois cas peuvent se présenter, selon que le système note les syllabes, les consonnes seules ou les voyelles et les consonnes. Les syllabaires ne constituent pas toujours historiquement un stade antérieur à celui des alphabets. S'il est vrai que les plus anciens syllabaires connus (en particulier le cypriote) précèdent l'invention de l'alphabet (consonantique) par les Phéniciens, d'autres sont, au contraire, des adaptations d'alphabets : c'est le cas de la brahmi, ancêtre de toutes les écritures indiennes actuelles, qui procède de l'alphabet araméen, ou du syllabaire éthiopien, qui a subi des influences sémitiques et grecques.
Quant à la naissance de l'alphabet grec, elle a été marquée, semble-t-il, aussi bien par le modèle phénicien que par celui des syllabaires cypriote et crétois (linéaires A et B). Les systèmes syllabiques se caractérisent par leur côté relativement peu économique, puisqu'il faut, en principe, autant de signes qu'il y a de possibilités de combinaison voyelle-consonne. D'autre part, ils présentent l'inconvénient de ne pouvoir noter simplement que les syllabes ouvertes (C+V) ; en cas de syllabe fermée (C+V+C) ou de groupement consonantique (C+C+V), l'un des signes contiendra un élément vocalique absent de la prononciation.
Les alphabets consonantiques, dont le phénicien est historiquement le premier exemple, ne conviennent bien qu'à des langues ayant la structure particulière des langues sémitiques : la racine des mots y possède une structure consonantique qui est porteuse de leur sens, la vocalisation pouvant être devinée par l'ordre très rigoureux des mots dans la phrase, qui indique leur catégorie grammaticale et, par là même, leur fonction. L'alphabet araméen a servi de modèle à toute une série d'alphabets (arabe, hébreu, syriaque, etc.), ainsi qu'à des syllabaires (brahmi) ; l'alphabet arabe a servi et sert à noter des langues non sémitiques, non sans quelques difficultés (il a ainsi été abandonné pour le turc).
Alphabet grec
L'alphabet grec est historiquement le premier exemple d'une écriture notant à la fois et séparément les consonnes et les voyelles. Il a servi de modèle à toutes les écritures du même type qui existent actuellement : alphabets latin, cyrillique, arménien, géorgien, etc.
PÉDAGOGIE
L'apprentissage de l'écriture fait appel à une maîtrise de la fonction symbolique ainsi qu'à une maîtrise motrice de l'espace et du temps. Il s'effectue soit par l'étude progressive et linéaire des lettres, servant à former les mots (méthode analytique), soit par la compréhension directe des mots dans le contexte de la phrase, dont on décomposera seulement après les lettres (méthode globale d’Ovide Decroly). Mais ce sont de plus en plus des méthodes mixtes qui sont utilisées, intégrant parfois expression corporelle et exercices de motricité.
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