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TRAVERSEE D'UN ELECTRON DANS UN METAL

 

Paris, 21 septembre 2011

Première traversée en solitaire d'un électron dans un métal
Quiconque chercherait à traquer un électron dans un métal serait bien en peine : les électrons sont non seulement des particules indiscernables les unes des autres, mais ils ont tendance à se déplacer en groupe dans les métaux. Pourtant, c'est bien la traversée solitaire d'un électron dans un tel matériau qu'ont réussi à observer et à maîtriser des physiciens de l'Institut Néel (CNRS) à Grenoble. Pour débusquer le phénomène, les chercheurs ont fabriqué un dispositif expérimental à base de « boîtes quantiques », entre lesquelles un unique électron a littéralement surfé sur une onde sonore. Une première qui pourrait sonner le début de la téléportation du spin d'un électron et de l'ordinateur quantique. Ces travaux sont publiés dans la revue Nature le 22 septembre 2011.
Les boîtes quantiques sont le premier élément clé du dispositif conçu par les physiciens grenoblois, en collaboration avec les universités de Tokyo et de Bochum, en Allemagne. Circuits électroniques de plus en plus répandus dans les laboratoires de physique, les boîtes quantiques sont des sortes de pièges microscopiques à électrons. C'est-à-dire qu'on sait, via un fil électrique afférent, y glisser un par un des électrons. Les chercheurs de Grenoble ont placé deux de ces boîtes aux extrémités d'un canal sculpté dans une fine couche d'or (elle-même superposée à un sandwich constitué d'un isolant, de l'arséniure de gallium et d'un métal). La première boîte sert à libérer un électron dans le canal. La seconde, à récupérer la particule à l'autre bout, 3 microns plus loin.

Mais pour rendre possible cette traversée au long cours d'un électron, encore fallait-il aux physiciens imaginer un moyen de propulser l'électron d'une boîte quantique à l'autre. Un rôle dévolu à un générateur d'ondes radio, pièce essentielle de l'expérience. En émettant des ondes radio, le générateur produit par effet piézoélectrique (la capacité d'un matériau à se déformer en présence d'un champ électromagnétique) des ondes sonores dans l'arséniure de gallium. Ces ondes se comportent alors comme des vagues qui poussent l'électron le long du canal, un « surf » version électronique. En inventant ce mode de propulsion inédit, les scientifiques ont fait de l'électron un navigateur solitaire.

Au-delà de la performance expérimentale, le « surf électronique » donne des pistes en physique fondamentale pour généraliser les expériences d'optique quantique à d'autres particules que les photons. Pour l'instant, les grains de lumière sont en effet les seules particules à s'être prêtées à la téléportation et à la cryptographie quantiques. L'obstacle pour utiliser des électrons était précisément la difficulté à les déplacer individuellement entre boîtes quantiques (les briques de bases qu'on envisage pour ce type de physique). En faisant sauter ce verrou, le surf sur ondes sonores est un pas vers la téléportation du spin d'un électron, la cryptographie quantique à base d'électrons et l'ordinateur quantique.

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TOUT L'UNIVERS DANS UN ATOME

 

Tout l'Univers dans un atome
(Exposé en langue Anglaise.)

Dans cet exposé, je vais expliquer que l'univers gigantesque dans lequel nous vivons abrite un nombre incroyable de minuscules univers : les atomes. Ils présentent une structure extrêmement riche qui a permis aux physiciens d'exercer leur sagacité durant tout le siècle précédent. Le sujet de cet exposé est cet univers microscopique que l'on trouve à l'intérieur des atomes mais il est intimement relié à l'univers macroscopique qui nous est rendu plus familier par les images des médias comme celle de la conquête spatiale.

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DOCUMENT   PEDAGOGIQUE

 

Tout lunivers dans un atome
Gerardus t Hooft

Dans cet exposé, je vais expliquer que l'univers gigantesque dans lequel nous vivons abrite un nombre incroyable de minuscules univers : les atomes. Ils présentent une structure extrêmement riche qui a permis aux physiciens dexercer leur sagacité durant tout le siècle précédent. Le sujet de cet exposé est cet univers microscopique que lon trouve à lintérieur des atomes mais il est intimement relié à lunivers macroscopique qui nous est rendu plus familier par les images des médias comme celle de la conquête spatiale.

Au début nexistait qu'un point, et rien dautre que ce point. Il y a plus de 13 milliards dannées, ce point explosa, marquant le début de lunivers tout entier. Depuis ce moment, lunivers est régi par les lois de la physique. Lors de ses premiers instants, il évolua extrêmement rapidement. Des choses complexes arrivèrent alors, que lon comprend difficilement.

La première lumière de lunivers, que lon observe maintenant, est apparue 380 000 ans après cette explosion. Ce nest quun milliard dannées plus tard que lunivers commence à ressembler à ce quil est aujourdhui : un univers constitué détoiles, situées à lintérieur de galaxies séloignant les unes des autres.

Deux choses remarquables caractérisent lunivers. La première, cest qu'il est presque vide : il existe de grands espaces désertiques entre les étoiles et les galaxies, de telle sorte quen moyenne, lunivers présente une densité de quelques atomes seulement par kilomètre cube. La deuxième, cest que tous les objets de lunivers obéissent aux lois de la physique de manière extrêmement précise. Des expériences de toutes sortes, ainsi que des calculs complexes établissent une chose qui nétait pas évidente a priori : les lois de la physique semblent partout les mêmes, peu importe la direction dans laquelle on observe lunivers. Lune de ces lois est celle de la gravitation. Cest elle qui fait que les planètes décrivent autour du soleil des ellipses presque parfaites. Elle implique également que les planètes accélèrent à proximité du soleil et décélèrent quand elles sen éloignent. Il sagit dune loi parmi dautres mais dont les effets sont clairement visibles.

L'univers compte un nombre démesurément grand d'atomes et dans ces mondes minuscules que sont les atomes, on trouve des objets, les électrons, qui se déplacent selon des lois physiques ressemblant beaucoup à celles régissant le mouvement des planètes autour du soleil. Les électrons tournent autour dun objet central que lon appelle le noyau atomique. L'atome constitue ainsi un univers à lui tout seul, mais avec des dimensions minuscules.

La structure de l'atome

Dire qu'un atome peut être assimilé à un système planétaire serait en fait mentir. L'atome est gouverné par des lois beaucoup plus complexes, celles de la mécanique quantique. Celle-ci dit quen moyenne, les électrons se déplacent selon des orbites elliptiques ; mais cela en moyenne seulement. Leur mouvement est en fait aléatoire, il semble incontrôlé. Autour dun noyau, certaines régions sont dépeuplées d'électrons alors que dautres en fourmillent. Ce sont les lois de la mécanique quantique qui permettent de faire la distinction entre ces régions.

L'atome possède une autre caractéristique qui le rapproche de l'univers : il est quasiment vide. En effet, le noyau atomique est environ 100 000 fois plus petit que les orbites des électrons, ce qui rend latome beaucoup plus vide en réalité quun système planétaire. Cest ce noyau, dont lunité de taille est le Fermi, 10-15 m, qui est la partie la plus intéressante et la plus complexe de l'atome.

Il y a plusieurs décennies, les physiciens découvrirent que le noyau atomique est constitué de deux sortes dobjets : les protons et les neutrons. Les premiers sont électriquement chargés alors que les seconds sont neutres, mais hormis cette différence, ces deux objets sont similaires. Ce qui a été découvert plus récemment dans l'histoire de la physique des particules est quils sont tous les deux constitués de trois sous-unités appelées quarks. Ces derniers obéissent à des lois très particulières qui seront évoquées plus loin.

Il y a 35 ans l'existence des quarks était à peine vérifiée. On ne comprenait pas leur comportement, ni pourquoi protons et neutrons étaient constitués de trois dentre eux. Toutes les particules observées à l'époque étaient cependant regroupées en plusieurs classes, de la même façon quen biologie les espèces d'animaux et de plantes sont classées en familles. Il existait une distinction entre les leptons, particules insensibles à ce qui fut appelé plus tard la force forte, et les hadrons, qui y étaient sensibles et avaient donc un comportement totalement différent. Les hadrons furent ensuite séparés entre mésons et baryons. Enfin, il existait une troisième sorte de particules, les photons, qui avec leur comportement radicalement différent des autres, constituaient une famille à eux seuls.

Les leptons, dont on connaissait deux représentants à lépoque, électrons et muons, peuvent être chargés électriquement, le plus souvent de manière négative, ou bien être neutres : on les appelle alors neutrinos. De manière générale, les particules sont caractérisées par leur charge électrique ainsi que par leur spin, propriété liée à leur rotation. Elles sont également accompagnées de leurs « contraires », si lon peut dire, leurs antiparticules. Il existe ainsi des antileptons et des antibaryons. Les mésons, eux, sont identiques à leurs antiparticules.

Beaucoup de questions émergent de cette classification : Comment peut-on expliquer le comportement de toutes ces particules ? Comment peut-on les décrire ? Enfin, comment sagencent-elles pour former les atomes ? Pour répondre à ces questions, il a été nécessaire de les étudier.

Les outils pour étudier la structure de l'atome

Pour étudier les atomes, il a été nécessaire de construire de très grandes machines, les accélérateurs de particules. Lun deux est situé à la frontière de la Suisse et de la France, près de Genève. Sil nétait pas situé sous terre, parfois à cent mètres de profondeur, dun avion on pourrait constater quil a la forme dun cercle de 26 km de circonférence. Il sagit dun circuit que des particules parcourent chacune dans un sens opposé pour se heurter de plein fouet. Les investigations des physiciens concernent ce qui se déroule lors de telles collisions. Cette machine appelée LEP, pour Large Electron-Positron Collider, a été démontée il y a quelques années pour être remplacée par une autre machine, le LHC, acronyme pour Large Hadron Collider. La première a intensivement étudié les leptons, comme lélectron et son antiparticule, alors que la nouvelle génération daccélérateurs étudiera les hadrons. Les physiciens doivent cependant attendre encore plusieurs années avant de recevoir les premiers résultats du LHC, prévus en 2007.

La photographie (fig.1) représente un des nombreux détecteurs de particules utilisés dans les accélérateurs. Comparés à la taille dun homme, ces objets sont particulièrement grands. Ceci est une source de questionnement pour les néophytes : pourquoi nutilise-t-on pas de petits détecteurs pour étudier des particules si minuscules ? N'y gagnerait-on pas en résolution ? Il se trouve que non. Pour bien voir de petits objets, il faut de grosses machines. Par exemple, on pourrait penser que les insectes, avec leurs petits yeux, se voient très bien. Cest tout le contraire. Nous voyons beaucoup mieux les insectes quils ne se voient eux-mêmes, car nos yeux sont beaucoup plus gros que les leurs. Cest pour cela que les insectes ont des antennes, comblant ainsi leur déficit sensoriel. Ainsi, former des images de minuscules particules nécessite dénormes appareils. Les physiciens, qui cherchent à sonder la matière le plus profondément possible, doivent par conséquent construire les machines les plus imposantes qui soient& tout en respectant un certain budget.

        

figure 1

Les forces dinteractions et les particules de Yang-Mills

Revenons encore trente cinq ans en arrière. A cette époque, il fallait comprendre leurs interactions pour pouvoir décrire les particules & Quelles soient déviées, crées ou annihilées, les physiciens ont réuni tous ces phénomènes dans le concept de force. Ils ont ainsi découvert que trois sortes de forces totalement différentes agissaient sur les noyaux atomiques. Lune delles est assez familière, il sagit de lélectromagnétisme. Cest la force qui est utilisée de manière prédominante dans les microphones et les télévisions. Les uns utilisent la force électromagnétique pour amplifier la voix, les autres pour créer une image sur lécran. De manière plus simple, on peut voir leffet de cette force quand un aimant se déplace à proximité dun autre aimant, ou dun objet en fer. Ou bien même quand on se coiffe par temps sec et que les cheveux sélectrisent. Il existe également deux autres forces actives dans le domaine des particules élémentaires : la force forte et la force faible. On connaissait peu de leurs propriétés il y a 35 ans, et par bien des aspects, elles restaient énigmatiques : comment affectent-elles le comportement des particules ?

Il est très difficile de répondre à cette question. On savait quelles devaient obéir à la fois à la théorie de la relativité dEinstein et aux lois de la mécanique quantique. Mais ces lois sont complexes, et il est très difficile de les réconcilier pour que les mouvements observés des particules respectent ces deux théories fondamentales. Ce nest quen 1954 quune avancée fut effectuée. Deux physiciens américains, Robert-Mills, étudiant à lépoque et Chen Ning Yang, futur prix Nobel, proposèrent ensemble une façon de décrire les particules subatomiques. Leur réflexion fut la suivante : certaines forces de la nature sont déjà connues, les forces électromagnétiques ; peut-on imaginer une nouvelle force, quelque chose de plus général que lélectricité et le magnétisme, quon pourrait décrire avec des équations similaires et qui serait cohérente avec les connaissances acquises par ailleurs en physique ? Ils trouvèrent une réponse à cette question mais ils se rendirent compte très tôt quelle était probablement erronée. Beaucoup de physiciens avaient eu des idées similaires mais les avaient rejetées car ils ne leur trouvaient aucun sens. Peut-être navaient-t-elles aucun sens mais elles étaient tellement belles quils publièrent néanmoins leurs travaux, malgré les critiques de leurs pairs, laissant aux autres le soin de sinquiéter du fait quelles naient rien de réel.

Quont-ils donc inventé qui allait devenir si important, seulement quelques décennies plus tard ? Yang et Mills imaginèrent quil existait un autre champ, ressemblant beaucoup aux champs électriques et magnétiques, mais qui en serait également différent par certains aspects : une particule évoluant dans un tel champ changerait didentité. Au passage, rappelons que lidentité est une caractéristique essentielle des particules : la modifier a dénormes conséquences sur leur comportement. Un champ électromagnétique n'altère pas cette identité, mais Yang et Mills imaginèrent quune particule puisse transmuter en une autre quand elle traverserait le champ quils ont décrit. Un proton, par exemple, deviendrait neutron. Le point fondamental est que deux particules initialement identiques pourraient ainsi devenir différentes.

 
 
 
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LA LUMIERE

 

Paris, 11 mai 2011

Quand la vitesse de la lumière dépend de sa direction


La lumière ne se propage pas à la même vitesse dans toutes les directions sous l'effet d'un champ électro-magnétique. Cet effet contre intuitif, mais prédit par la théorie, vient pour la première fois d'être vérifié expérimentalement dans un gaz par une équipe du Laboratoire « Collisions agrégats réactivité » (CNRS / Université Paul Sabatier – Toulouse 3). Les chercheurs ont mesuré avec une extrême précision, de l'ordre du milliardième de m/s (1), l'écart entre les vitesses de propagation de la lumière dans un sens et dans le sens inverse. Ces résultats ouvrent la voie à des recherches plus poussées visant à améliorer le modèle qui décrit les interactions entre particules élémentaires. Publiés le 11 mai 2011 dans la revue Physical Review Letters, ils laissent entrevoir des applications inédites en optique.
Dans le vide absolu, la lumière se propage à une vitesse constante égale à 299 792 458 m/s. Le fait qu'elle se déplace à une même vitesse dans toutes les directions paraît naturel. Or, contrairement à notre intuition, il existe des cas de figure pour lesquels cette propriété n'est pas vérifiée, notamment lorsqu'un champ électrique et un champ magnétique sont appliqués. Ces cas sont prédits par la théorie depuis la fin des années 70 et devraient même être observés dans le vide. Mais ces variations, très faibles, sont difficiles à vérifier expérimentalement.

Aujourd'hui, les avancées technologiques permettent de détecter ces effets dans un gaz (en l'occurrence l'azote). Pour les observer, des chercheurs du CNRS et de l'Université Paul Sabatier ont conçu une cavité optique (2) dans laquelle les faisceaux lumineux traversent un dispositif comportant des aimants et des électrodes, qui permettent de générer des champs électrique et magnétique intenses (le champ magnétique appliqué est 20 000 fois plus élevé que celui de la Terre). Ils sont ainsi parvenus à montrer, pour la première fois expérimentalement, que la lumière ne se propage pas à la même vitesse selon qu'elle se dirige dans une direction ou bien en sens inverse, dans un gaz où règne un champ électro-magnétique. La différence de vitesse mesurée est d'environ un milliardième de m/s (soit 10-9 m/s, ce qui équivaut à 10-18 fois la vitesse de la lumière). Cet écart infime, prédit par la théorie, est causé par les champs magnétique et électrique.

Ces résultats ouvrent plusieurs perspectives. D'une part, ils pourraient permettre de pousser plus loin les mesures de l'anisotropie de la propagation lumineuse. En augmentant la sensibilité du dispositif de mesure, les chercheurs pourraient, un jour, observer des défaillances infimes de l'invariance de Lorentz, qui est une symétrie fondamentale exprimée dans le cadre de la théorie de la relativité. Ceci permettrait de tester certaines propositions théoriques pour améliorer le modèle standard (modèle qui décrit aujourd'hui l'ensemble des interactions entre particules élémentaires). D'autre part, une telle anisotropie directionnelle régie par un champ électro-magnétique laisse présager des applications inédites en optique, comme des composants dont le comportement diffèrerait selon la direction, le tout étant contrôlé par le champ magnétique.

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LES ATOMES FROIDS

 

Paris, 20 septembre 2011

Vers des accéléromètres à atomes froids de plus grande précision


Pour la première fois, une équipe de physiciens français (CNRS, Institut d'Optique Graduate School, Observatoire de Paris, ONERA, UPMC, Université Paris-Sud et Université de Bordeaux), soutenue par le CNES et l'ESA, a réussi à mettre au point un accéléromètre à atomes froids résistant aux vibrations. Testé lors d'un vol parabolique, ce prototype a pu mesurer des accélérations infimes, ce qui n'était possible jusqu'ici qu'en laboratoire. De quoi espérer développer bientôt des accéléromètres à atomes froids transportables et ainsi perfectionner les systèmes de positionnement et la prospection géologique, ou encore tester directement des volets de la relativité d'Einstein. Ces résultats sont publiés dans Nature communications.
Les accéléromètres atomiques offrent une précision nettement supérieure aux accéléromètres traditionnels, employés notamment dans les smartphones ou à bord des satellites et des navires. Hélas, ils doivent leur fragilité à leur principe même de fonctionnement : ils utilisent des atomes refroidis par laser à une température proche du zéro absolu. Les atomes manifestent alors un comportement ondulatoire, comme les faisceaux lumineux, permettant de réaliser des interféromètres à ondes de matière extrêmement sensibles aux accélérations. C'est cette particularité qu'exploitent les accéléromètres atomiques, mais au prix d'une complexité expérimentale diabolique et d'une extrême sensibilité aux vibrations.

Les faire fonctionner à bord de l'Airbus « A300 ZERO-G » de la société Novespace, qui décrit des paraboles dans le ciel pour reproduire la microgravité, relevait donc de la gageure. Pour y parvenir, l'équipe de chercheurs a inventé une technique inédite en croisant les données issues de l'accéléromètre atomique avec celles d'accéléromètres conventionnels. Cela leur a permis de mesurer l'accélération de l'avion avec une précision plusieurs centaines de fois supérieure aux autres accéléromètres à partir d'un signal pourtant extrêmement bruité en raison des secousses permanentes.

La démonstration de la viabilité de cet accéléromètre atomique en conditions difficiles ouvre la voie à une exploitation commerciale. Le modèle utilisé en vol était volumineux (4 m3), mais les scientifiques du CNRS en ont développé depuis une version transportable, de la taille d'une malle. Commercialisée dès l'an prochain, elle est destinée avant tout aux laboratoires de recherche en géophysique. En effet, toute variation dans la composition de la croûte terrestre se reflète dans le champ de pesanteur local : en cartographiant finement ce champ sur le terrain à l'aide d'un accéléromètre atomique, on pourrait identifier des filons minéraux, surveiller l'activité sismique ou volcanique du sous-sol, contrôler la sécurité de puits de pétrole…

Sur le plan de la recherche fondamentale, l'accéléromètre va servir à tester le principe d'équivalence de la relativité générale, selon laquelle l'accélération de la gravité est la même pour tous les objets. C'est d'ailleurs pour cette raison que les chercheurs ont veillé à rendre leur instrument capable d'encaisser des vols paraboliques, au cours duquel l'appareil se trouve brièvement en microgravité. Le principe d'équivalence sera mis à l'épreuve lors de prochaines expériences en vol, mettant en scène deux accéléromètres atomiques fonctionnant avec des atomes de nature différente. Les scientifiques chercheront ainsi à savoir si les accéléromètres donnent strictement les mêmes résultats. Une réponse affirmative signifierait qu'Einstein avait raison.

Ces travaux ont été réalisés dans le cadre du projet ICE (Interféromètre Cohérence dans l'Espace) qui est une collaboration entre :

- le Laboratoire Charles Fabry (Institut d'Optique Graduate School, CNRS, Université Paris-Sud)

- le Laboratoire Photonique Numérique et Nanosciences (Université Bordeaux 1, Institut d'Optique Graduate School, CNRS)

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