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Résistance aux antibiotiques

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Résistance aux antibiotiques


Sous titre
Un phénomène massif et préoccupant
        
Les antibiotiques ont permis de faire considérablement reculer la mortalité associée aux maladies infectieuses au cours du 20e siècle. Hélas, leur utilisation massive et répétée, que ce soit en ville ou à l'hôpital, a conduit à l’apparition de bactéries résistantes à ces médicaments. Qui plus est, les animaux d'élevage ingèrent au moins autant d'antibiotiques que les humains ! Résultat : la résistance bactérienne est devenue un phénomène global et préoccupant. Pour éviter le pire, la communauté internationale, alertée en 2015 par l'OMS, se mobilise. La route est longue...
       

Dossier réalisé en collaboration avec Jean-Luc Mainardi, unité 1138 Inserm/Sorbonne Université/Université Paris Descartes/Université Paris Diderot, équipe Structures bactériennes impliquées dans la modulation de la résistance aux antibiotiques, Centre de Recherche des Cordeliers, Paris et Marie-Cécile Ploy, unité 1092 Inserm/Université de Limoges, équipe Anti-Infectieux : supports moléculaires des résistances et innovations thérapeutiques, Institut Génomique, environnement, immunité, santé et thérapeutiques, Limoges

Comprendre le phénomène de la résistance aux antibiotiques
Les antibiotiques sont, à l'origine, des molécules naturellement synthétisées par des microorganismes pour lutter contre des bactéries concurrentes de leur environnement. Aujourd’hui, il existe plusieurs familles d’antibiotiques, naturels, semi-synthétiques ou de synthèse, qui s’attaquent spécifiquement à une bactérie ou un groupe de bactéries. Certains antibiotiques vont agir sur des bactéries comme Escherichia coli dans les voies digestives et urinaires, d’autres sur les pneumocoques ou sur Haemophilus influenzae dans les voies respiratoires, d’autres encore sur les staphylocoques ou les streptocoques présents au niveau de la peau ou de la sphère ORL.


Les antibiotiques sont spécifiques des bactéries
Les antibiotiques ne sont efficaces que sur les bactéries et n’ont aucun effet sur les virus et les champignons. Ils bloquent la croissance des bactéries en inhibant la synthèse de leur paroi, de leur matériel génétique (ADN ou ARN
ARN
Molécule issue de la transcription d'un gène.
), de protéines qui leur sont essentielles, ou encore en bloquant certaines voies de leur métabolisme. Pour cela, ils se fixent sur des cibles spécifiques.

L’antibiorésistance, un phénomène devenu global
L’efficacité remarquable des antibiotiques a motivé leur utilisation massive et répétée en santé humaine et animale (voir encadré). Cela a créé une pression de sélection sur les populations bactériennes, entraînant l'apparition de souches résistantes. En effet, lorsqu'on emploie un antibiotique, seules survivent – et se reproduisent – les bactéries dotées de systèmes de défense contre cette molécule. La mauvaise utilisation des antibiotiques – traitements trop courts, trop longs ou à posologies inadaptées – est également pointée du doigt.
Ponctuelles au départ, ces résistances sont devenues massives et préoccupantes. Certaines souches sont multirésistantes, c’est-à-dire résistantes à plusieurs antibiotiques. D’autres sont même devenues toto-résistantes, c’est-à-dire résistantes à quasiment tous les antibiotiques disponibles. Ce phénomène, encore rare en France mais en augmentation constante, place les médecins dans une impasse thérapeutique : ils ne disposent plus d’aucune solution pour lutter contre l’infection.

Homme, animal, environnement : un seul monde
D’après l’OMS, plus de la moitié des antibiotiques produits dans le monde sont destinés aux animaux. Aux Etats-Unis, à côté d’une utilisation à visée thérapeutique,  les antibiotiques sont aussi utilisés de façon systématique à faibles doses comme facteurs de croissance, une pratique interdite en Europe depuis 2006. Or la surconsommation d’antibiotiques entraîne l’apparition de résistances. Et les bactéries multi-résistantes issues des élevages peuvent se transmettre à l’Homme directement ou via la chaîne alimentaire.
Par ailleurs, hommes et animaux rejettent une partie des antibiotiques absorbés, via leurs déjections. D'où la présence de bactéries résistantes dans les cours d'eau en aval des villes ou des élevages, voire dans les nappes phréatiques.
Hôpital, médecine de ville, pratiques vétérinaires, environnement : tout est désormais lié. C'est pourquoi l'OMS, suivie par les grandes organisations internationales, préconise une vision globale de la lutte contre les antibiorésistances, l’approche One world, one health (Un monde, une santé).
Pendant longtemps, la majorité des cas de résistance était détectée à l’hôpital. Cependant le phénomène prend de plus en plus d'ampleur en ville, au détour d’antibiothérapies apparemment anodines. Ainsi, à l’occasion d’un banal traitement oral, une espèce bactérienne intestinale peut développer une résistance. L'antibiotique détruit la flore bactérienne associée et laisse le champ libre à la bactérie résistante pour se développer. Ces bactéries résistantes sont ensuite diffusées par voie manuportée, plus ou moins vite selon le niveau d'hygiène de la population.


De la résistance naturelle à la résistance acquise
La résistance aux antibiotiques peut résulter de plusieurs mécanismes :             production d’une enzyme modifiant ou
Certaines bactéries sont naturellement résistantes à des antimicrobiens. Plus préoccupante, la résistance acquise concerne l’apparition d’une résistance à un ou plusieurs antibiotiques chez une bactérie auparavant sensible. Ces résistances peuvent survenir via une mutation génétique affectant le chromosome de la bactérie, ou bien être liées à l’acquisition de matériel génétique étranger (plasmide, transposon) porteur d’un ou plusieurs gènes de résistance en provenance d’une autre bactérie. Les résistances chromosomiques ne concernent en général qu’un antibiotique ou une famille d’antibiotiques. Les résistances plasmidiques peuvent quant à elles concerner plusieurs antibiotiques, voire plusieurs familles d’antibiotiques. Elles représentent le mécanisme de résistance le plus répandu, soit 80% des résistances acquises.


L’antibiorésistance en chiffres
Certaines résistances posent surtout problème à l’hôpital. Les souches de Staphylococcus aureus résistantes à la méticilline (SARM) sont responsables d’infections diverses, pulmonaires et osseuses, ainsi que de septicémies, en particulier dans les unités plus sensibles (soins intensifs). Toutefois, des mesures spécifiques, notamment d’hygiène, ont permis de réduire ces résistances en France (33% en 2001, 15,7% en 2015).

Acinetobacter baumannii est également redoutée à l’hôpital. La part des infections nosocomiales liées à cette bactérie résistante à l’imipenème est passée de 2 ou 3% en 2008 à 11,1% en 2011. Le phénomène est d’autant plus préoccupant que cette bactérie persiste dans l’environnement et se développe préférentiellement chez des malades immunodéprimés et vulnérables.
Deux phénomènes importants dominent l'actualité des résistances. Tout d'abord l'augmentation continue, aujourd'hui plus encore en ville qu'à l’hôpital, des entérobactéries productrices de bêta-lactamases à spectre étendu (EBLSE). Certaines espèces comme Escherichia coli ou Klebsiella pneumoniae sont devenues résistantes aux céphalosporines de troisième génération (C3G) qui constituent les antibiotiques de référence pour traiter ces espèces bactériennes. En 2014, 11% des souches de E. coli et 35% de celles de K. pneumoniae isolées de bactériémies étaient devenues résistantes à ces C3G. Dans les infections urinaires, ces chiffres sont de 7% pour E. coli et 16% pour K. pneumoniae. Les médecins doivent alors utiliser des antibiotiques "de derniers recours" : les carbapénèmes.

Or, et c'est le deuxième phénomène très inquiétant, depuis quelques années apparaissent des souches d'entérobactéries produisant des carbapénémases. Ces enzymes détruisent ces antibiotiques et confèrent ainsi une résistance à la bactérie. Cela peut conduire à des situations d’impasse thérapeutique. Ce phénomène reste relativement peu fréquent en France contrairement à des pays comme la Grèce, Chypre, l'Afrique du Nord, les Etats-Unis ou l'Inde.

Pseudomonas aeruginosa, responsable de nombreuses infections nosocomiales, présente ainsi plus de 25% de résistance aux carbapénèmes. Certaines souches toto-résistantes sont notamment retrouvées chez les patients atteints de mucoviscidose ou transplantés pulmonaires.

Résistance aux antibiotiques : le classement de l'OMS
En février 2017, l'OMS a publié une liste de bactéries résistantes représentant une menace à l'échelle mondiale.
A. baumannii, P. aeruginosa et les entérobactéries productrices de bêtalactamases à spectre élargi (BLSE) représentent ainsi une urgence critique car elles résistent à un grand nombre d'antibiotiques.
Six autres bactéries, dont Staphylococcus aureus, Helicobacter pylori (ulcères de l’estomac), les salmonelles et Neisseria gonorrhoeae (gonorrhée), représentent une urgence élevée.
Enfin, pour Streptococcus pneumoniae, Haemophilus influenzae (otites) et les Shigella spp. (dysenterie), l'urgence est modérée.
De plus l'agent de la tuberculose, Mycobacterium tuberculosis, multirésistant dans certaines parties du monde, fait l'objet d'un programme propre de l'OMS.

La lutte s'organise

Réduire et mieux cibler la consommation d’antibiotiques
Pour préserver le plus longtemps possible l’efficacité des antibiotiques disponibles, il faut réduire leur consommation afin de limiter la pression de sélection sur les bactéries. Les plans de rationalisation des prescriptions et les campagnes de sensibilisation destinées au grand public ont fait baisser la consommation au début de ce siècle mais elle est aujourd'hui repartie à la hausse, en particulier en ville. La France reste parmi les plus gros utilisateurs mondiaux.
Dans ce contexte, il est important que les médecins puissent :
*         distinguer les infections virales des infections bactériennes car les antibiotiques n'affectent pas les virus. Des tests de dépistage rapide existent pour les angines, maladies très fréquentes, la plupart du temps virales et beaucoup trop souvent associées à la prescription d’antibiotiques. Malheureusement, ces tests restent sous-utilisés en France.
*          
*         choisir un antibiotique pertinent : en cas d'infection bactérienne, mieux vaut éviter l'utilisation systématique d'antibiotiques précieux (récents ou à large spectre) lorsque d'autres plus courants, ou à spectre plus étroit, suffisent et sont aussi efficaces. Le médecin doit pour cela savoir à quelles molécules réagit la bactérie responsable de la maladie de son patient. Il existe déjà des tests rapides de détection de la résistance à certains antibiotiques. Autre réflexion en cours : les laboratoires de microbiologie pourraient rendre des antibiogrammes "ciblés", testant la sensibilité de la souche à une gamme réduite d'antibiotiques ciblés sur la bactérie isolée chez le patient en fonction de sa pathologie et non, comme aujourd'hui, à la plupart des molécules disponibles. Il s'agit là aussi d'inciter le médecin à choisir un antibiotique courant plutôt que se diriger vers d’autres antibiotiques, comme par exemple des céphalosporines parmi les plus récentes.
*          
*         adapter la cure aux besoins, en particulier limiter la durée des traitements au strict nécessaire. De plus à l'hôpital, lorsqu'une antibiothérapie probabiliste est prescrite, il faut la réévaluer dans les 48-72 heures avec les résultats du laboratoire. Lorsqu'une antibiothérapie de plus de 7 jours est prescrite, cela doit se faire en accord avec un référent en antibiothérapie. Ce dernier a pour mission de diffuser la politique du bon usage des antibiotiques et son application pratique au sein des établissements de soin, en se reposant sur des recommandations élaborées par les différentes instances.


Une prise de conscience internationale
En mai 2015, l’OMS, la FAO (Food and Agriculture organization, l'organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture) et l'OIE (Office International des Epizooties, devenu l'organisation mondiale de la santé animale) ont adopté un Plan d’action mondial pour combattre la résistance aux antimicrobiens. Il se décline en cinq axes :
*         sensibiliser le personnel de santé et le public
*         renforcer la surveillance et la recherche
*         prendre des mesures d’assainissement, d’hygiène et de prévention des infections
*         optimiser l’usage des antimicrobiens en santé humaine et animale
*         soutenir des investissements durables pour la mise au point de nouveaux traitements, diagnostics ou vaccins
Déjà engagée dans la lutte, l'Union européenne a lancé des plans d'action en 2001 et 2011. Le tout dernier, datant de juin 2017, prend en compte la dimension globale du problème et vise à faire du continent une région de pointe. Il comprend, entre autres, une action conjointe, la Joint Action on Antimicrobial Resistance & Healthcare - Associated Infections, coordonnée par l'Inserm. Elle rassemble 44 partenaires institutionnels – ministères de la santé, instituts de recherche, instituts de santé publique – et vise à passer au concret, en particulier en s'inspirant de ce qui est déjà mis en place dans certains pays.
Pour sa part, la France a décliné le plan européen (annoncé en 2016) via une feuille de route interministérielle de novembre 2016, reprenant les mêmes grandes orientations. En ce qui concerne l'usage vétérinaire des antibiotiques, le plan Ecoantibio (2012-2017) est aujourd'hui remplacé par Ecoantibio2 (2017-2021).

Les enjeux de la recherche

Nouveaux antibiotiques
De nouveaux antibiotiques sont nécessaires pour lutter contre les bactéries multirésistantes. Le marché des antibiotiques étant beaucoup moins rentable que celui de médicaments donnés au long cours, comme par exemple les antihypertenseurs, les firmes pharmaceutiques ont peu investi dans cette recherche. Cependant, quelques nouvelles molécules sont disponibles comme la ceftolozane, une nouvelle céphalosporine associée à un inhibiteur de ß-lactamases, ou le tazobactam, disponible en France depuis 2016. Son spectre d’activité inclut les EBLSE et le bacille pyocyanique (Pseudomonas aeruginosa) multirésistant.

La piste la plus avancée aujourd'hui consiste à inhiber l’action des bêta-lactamases. Ces enzymes, produites par certaines bactéries, les rendent résistantes aux antibiotiques de la famille des bêta-lactamines (comme les céphalosporines de 3e et de 4e génération). L'avibactam, en particulier, est un inhibiteur de ß-lactamases n’appartenant pas à la famille des ß-lactamines, désormais commercialisé en association avec la ceftazidime, une céphalosporine de 3e génération. Cette combinaison est même efficace contre certaines bactéries résistantes aux carbapénèmes. Plusieurs inhibiteurs de la famille chimique de l'avibactam, en association avec d'autres ß-lactamines, sont en développement et/ou en cours d’évaluation.

Autres voies thérapeutiques

La phagothérapie reste en développement. Elle consiste à administrer des phages
phages
Virus qui n’infecte que les bactéries.
: des virus infectant et tuant spécifiquement certaines bactéries. Cette spécificité permet d’éliminer les bactéries pathogènes sans affecter les autres, contrairement aux antibiotiques à spectre large. Le développement industriel de cocktails de phages, préparés à l’avance ou "sur-mesure" pour lutter contre une bactérie spécifique, paraît néanmoins complexe.
Par ailleurs, l'administration orale d'antibiotiques présente l'inconvénient de tuer certaines bactéries commensales résidant dans le tube digestif, formant le microbiote. Différentes pistes de protection du microbiote intestinal – administration d'un antibiotique conjointement à du charbon absorbant, ou à une ß-lactamase agissant dans le côlon – sont à l'étude. De même, la transplantation fécale (pour restaurer un microbiote sain), déjà utilisée en clinique contre les infections répétées à Clostridium difficile, est aujourd'hui évaluée pour lutter contre les entérobactéries productrices de BLSE ou de carbapénèmases.
D’autres équipes tentent de développer des thérapies antivirulence : l’objectif n’est plus de tuer la bactérie responsable de l’infection, mais de bloquer les systèmes qui la rendent pathogène pour l’Homme. Des antitoxines (souvent des anticorps
anticorps
Protéine du système immunitaire, capable de reconnaître une autre molécule afin de faciliter son élimination.
monoclonaux) dirigées contre certaines toxines bactériennes sont aujourd'hui en phase expérimentale.

 

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Le FMI responsable de l'explosion de tuberculose ?

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Le FMI responsable de l'explosion de tuberculose ?

Par le 28.07.2008 à 21h55, mis à jour le 28.07.2008 à 21h55

Les pays de l’Europe de l’Est qui reçoivent un financement du Fonds monétaire international (FMI) connaissent une recrudescence importante de la tuberculose. A l’inverse les pays qui n’ont pas eu de prêts voient la maladie régresser.

Le bacille de Koch, agent pathogène de la tuberculose

Une étude parue la semaine dernière dans PLoS Medicine relève l’existence d’une association positive entre l’octroi d’un prêt du FMI et la recrudescence de la tuberculose dans les ex-pays du bloc soviétique. L’organisation internationale conteste ces résultats et accuse les auteurs de bidouillage scientifique. Et pourtant, de part le monde, nombreuses sont les voix qui dénoncent les effets dévastateurs des réformes imposés par le FMI (en échange de prêts) sur les systèmes de santé.

Après la chute du mur de Berlin, l’ensemble des pays satellites de l’URSS ainsi que la nouvelle Russie ont traversé une période de crise économique et d’agitation sociale dont la maitrise est en grande partie due à l’apport massif de capitaux occidentaux. Les transferts de flux se sont faits, sous forme de prêts, à travers différents organismes dont le FMI. Mais en échange de ces financements, le Fonds a demandé aux gouvernements de mettre en application un certain nombre de mesures : privatisation, réduction du nombre de fonctionnaires, ouverture à la concurrence des services...

Selon des chercheurs de l’Université de Cambridge, les conséquences de cette politique ont favorisé la recrudescence de la tuberculose. Dans les 21 pays observés, ils ont constaté que l’obtention d’un prêt du FMI est associée, chaque année, à une augmentation de 13,9 pour cent de nouveaux cas de tuberculose , à une augmentation de 13,3 pour cent du nombre de personnes vivant avec la maladie et à une augmentation de 16,6 pour cent de la mortalité liée au bacille. L'étude a pris en compte plusieurs facteurs pouvant fausser les résultats comme la prévalence du sida ou l'âge de la population.

Même après cette modération, une augmentation de un pour cent du montant du prêt accordé reste associée à une augmentation de 0,9 pour cent de la mortalité. Dans le même temps, en Slovénie, l’un des seuls pays à ne pas faire partie du programme du FMI, les décès liés à la tuberculose ont chuté de 31%...Aujourd'hui, les taux de tuberculose dans les pays de l’Est sont parmi les pires au monde, et l'OMS note que l'ex-URSS est la seule région en retard sur les objectifs de développement du Millénaire dont le but est « d’arrêter et d'inverser » la propagation de la tuberculose. Par la voix de sont porte-parole, le FMI soutient que sans les prêts octroyés, la situation sanitaire des pays débiteurs seraient bien pire.


Joël Ignasse
Sciences et Avenir.com
28/07/2008

 

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INTELLGENCE ARTIFICIELLE ET SANTÉ

 

 

 

 

 

 

 

INTELLIGENCE  ARTIFICIELLE  ET  SANTÉ


Sous titre
Des algorithmes au service de la médecine
        

L’intelligence artificielle (IA) est un domaine de recherche en pleine expansion et promis à un grand avenir. Ses applications, qui concernent toutes les activités humaines, permettent notamment d’améliorer la qualité des soins. L’IA est en effet au cœur de la médecine du futur, avec les opérations assistées, le suivi des patients à distance, les prothèses intelligentes, les traitements personnalisés grâce au recoupement d’un nombre croissant de données (big data), etc.
Les chercheurs développent pour cela des approches et techniques multiples, du traitement des langues et de la construction d’ontologies, à la fouille de données
fouille de données
Technique visant à extraire un savoir ou une connaissance à partir des mégadonnées par des méthodes automatiques ou semi-automatiques. On parle aussi de data mining.
et à l’apprentissage automatique. Il est toutefois indispensable que le grand public comprenne comment fonctionnent ces systèmes pour savoir ce qu’ils font et surtout ce qu’ils ne font pas. Le robot omniscient, qui pour beaucoup symbolise l’IA, n’est pas pour demain !
       

       

       

*         TEMPS DE LECTURE 30-40 min 
DERNIÈRE MISE À JOUR 06.07.18 
DIFFICULTÉ 4 sur 5
*        
Dossier réalisé en collaboration avec Jean Charlet, AP-HP et Laboratoire d'informatique médicale et ingénierie des connaissances pour la e-santé (LIMICS, unité 1142 Inserm/Sorbonne Université/Université Paris 13), Paris

Comprendre l’IA
L’intelligence artificielle est née dans les années 1950 avec l’objectif de faire produire des tâches humaines par des machines mimant l’activité du cerveau. Face aux déboires des premières heures, deux courants se sont constitués.
Les tenants de l’intelligence artificielle dite forte visent à concevoir une machine capable de raisonner comme l’humain, avec le risque supposé de générer une machine supérieure à l’homme et dotée d’une conscience propre. Cette voie de recherche est toujours explorée aujourd’hui, même si de nombreux chercheurs en IA estiment qu’atteindre un tel objectif est impossible.
D’un autre côté, les tenants de l’intelligence artificielle dite faible mettent en œuvre toutes les technologies disponibles pour concevoir des machines capables d’aider les humains dans leurs tâches. Ce champ de recherche mobilise de nombreuses disciplines, de l’informatique aux sciences cognitives en passant par les mathématiques, sans oublier les connaissances spécialisées des domaines auxquels on souhaite l’appliquer. Cette approche - dont il sera question tout au long de ce dossier - génère tous les systèmes spécialisés et performants qui peuplent aujourd’hui notre environnement : créer des profils d'amis possibles sur les réseaux sociaux, identifier des dates dans les textes pour classer des dépêches d’agence, aider le médecin à prendre des décisions, etc. Ces systèmes, de complexité très variable, ont en commun d’être limités dans leurs capacités d’adaptation : ils doivent être manuellement adaptés pour accomplir d’autres tâches que celles pour lesquelles ils ont été initialement conçus.

Certains systèmes d’IA utilisent la logique…
L’approche la plus ancienne s’appuie sur l’idée que nous raisonnons en appliquant des règles logiques (déduction, classification, hiérarchisation…). Les systèmes conçus sur ce principe appliquent différentes méthodes, fondées sur l’élaboration de modèles d’interaction entre automates ou logiciels autonomes (systèmes multi-agents), de modèles syntaxiques et linguistiques (traitement automatique des langues) ou d’élaboration d’ontologies (représentation des connaissances). Ces modèles sont ensuite utilisés par des systèmes de raisonnement logique pour produire des faits nouveaux.
Dans les années 1980, cette approche, dite symbolique, a permis le développement d’outils capables de reproduire les mécanismes cognitifs d'un expert. C’est pourquoi on les a baptisés « systèmes experts ». Les plus célèbres, Mycin (identification d’infections bactériennes) ou Sphinx (détection d’ictères), s’appuient sur l’ensemble des connaissances médicales dans un domaine donné et une formalisation des raisonnements des spécialistes qui lient ces connaissances entre elles pour aboutir à un diagnostic.
Les systèmes actuels, qualifiés d’aide à la décision, de gestion des connaissances ou d’e-santé, sont plus sophistiqués. Ils bénéficient de meilleurs modèles de raisonnement ainsi que de meilleures techniques de description des connaissances médicales, des patients et des actes médicaux. La mécanique algorithmique est globalement la même, mais les langages de description sont plus efficaces et les machines plus puissantes. Ils ne cherchent plus à remplacer le médecin, mais à l’épauler dans un raisonnement fondé sur les connaissances médicales de sa spécialité.

Aider à la prise en charge des cancers du sein
Des équipes du Laboratoire d'informatique médicale et d'ingénierie des connaissances en e-santé (LIMICS, unité Inserm 1142) et de l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris, participent à un projet européen, Desiree, qui s’appuie sur l’approche symbolique pour aider les cliniciens dans le traitement et le suivi des patientes atteintes de cancers du sein. Ces maladies très complexes nécessitent en effet souvent des adaptations de protocoles classiques.
La plateforme Desiree intègre les recommandations de bonne pratique par la mise en œuvre d'un raisonnement fondé sur une ontologie. Le système peut également apprendre à partir des cas déjà résolus (reproduction des décisions prises pour des cas similaires au cas clinique à résoudre), ou d'un raisonnement par expérience (réutilisation de décisions qui étaient non conformes aux recommandations, sur la base de critères explicités dans la justification du non-suivi des recommandations). L’enrichissement continu de la base de cas permet de faire évoluer les propositions du système pour l'aide à la prise en charge thérapeutique des patientes.
La principale difficulté de l’approche symbolique est la modélisation des connaissances (description du domaine et du raisonnement) qui s’appuie sur un travail approfondi avec des spécialistes du domaine concerné.

…D’autres exploitent l’expérience passée
Contrairement à l’approche symbolique, l’approche dite numérique raisonne sur les données. Le système cherche des régularités dans les données disponibles pour extraire des connaissances, sans modèle préétabli. Cette méthode, née avec le connexionnisme et les réseaux de neurones artificiels dans les années 1980, se développe aujourd’hui grâce à l’augmentation de puissance des ordinateurs et à l’accumulation des gigantesques quantités de données, le fameux big data.
La plupart des systèmes actuels procèdent par apprentissage automatique, une méthode fondée sur la représentation mathématique et informatique de neurones biologiques, selon des modalités plus ou moins complexes. Les algorithmes d’apprentissage profond (deep learning) par exemple, dont l’usage explose depuis une dizaine d’années, s’inspirent du fonctionnement cérébral : ils simulent un réseau de neurones organisés en différentes couches, échangeant les uns avec les autres. La force de cette approche est que l’algorithme apprend la tâche qui lui a été assignée par "essais et erreurs", avant de se débrouiller tout seul.

Fond d’œil. Ce fond d’œil montre la répartition des points de coagulation proposée par un logiciel de pilotage du laser pour traiter une rétinopathie diabétique. L’IA permet de dépister automatiquement les patients qui devraient pouvoir subir une telle intervention. © National Eye Institute, NIH.
Des applications de deep learning existent en traitement d’images, par exemple pour repérer de possibles mélanomes
mélanomes
Tumeur maligne de la peau.
sur les photos de peau, ou bien pour dépister des rétinopathies diabétiques sur des images de rétines. Leur mise au point nécessite de grands échantillons d’apprentissage : 50 000 images dans le cas des mélanomes, et 128 000 dans celui des rétinopathies, ont été nécessaires pour entraîner l’algorithme à identifier les signes de pathologies. Pour chacune de ces images on lui indique si elle présente ou non des signes pathologiques. A la fin de l’apprentissage, l’algorithme arrive à reconnaître avec une excellente performance de nouvelles images présentant une anomalie.

La robotique en pleine expansion
La robotique est un sous-domaine spécifique de l’IA. Elle vise à augmenter l’autonomie des machines en les dotant de capacités perceptuelles, décisionnelles et d’action.
La chirurgie assistée par ordinateur en est sans doute un des versants le plus connu. Elle permet aujourd’hui d’améliorer la précision des gestes ou d’opérer à distance.
Les prothèses intelligentes visent quant à elles à réparer, voire augmenter le corps humain : membres ou organes artificiels (bras, cochlée, cœur, sphincter…), simulateur cardiaque, etc.
Les robots d’assistance aux personnes, âgées ou fragiles par exemple, représentent un troisième secteur très médiatisé et en fort développement. Cette robotique de service vise à imiter le vivant et à interagir avec les humains. Elle soulève de nombreux problèmes éthiques, portant notamment sur la protection de la vie privée et des données personnelles, mais aussi sur les conséquences d’un brouillage de la frontière humain-robot. Une frontière qui peut être vite franchie par l’utilisateur.

Les enjeux de la recherche
L’IA est en plein essor et de nombreuses voies de recherche sont explorées pour améliorer les performances techniques de ces systèmes, mais aussi leur adéquation aux pratiques médicales visées. Leur coût doit également être justifié par une réelle plus-value pour le médecin ou le patient.
Les voies de recherche portent en particulier sur le traitement des données, très hétérogènes, leur structuration et leur anonymisation, mais aussi sur la conception de systèmes transparents pour l’utilisateur et bien adaptés au contexte d’utilisation.

Un goulot d’étranglement : la qualité de l’échantillon de données
L’approche numérique peut se prévaloir de grandes performances en médecine, mais elle nécessite des données parfaitement propres et bien annotées, comme celles utilisées pour la reconnaissance de mélanomes. Or la plupart des données médicales n’ont pas été recueillies dans l’objectif que se fixe le concepteur de logiciel. Elles posent donc de nombreux problèmes pour leur exploitation.
La France dispose en particulier d’une des plus grandes bases en santé du monde : son système national de données médico-administratives, le SNIIRAM (pour Système national d’information interrégimes de l’Assurance Maladie). Cette base stocke toutes les prescriptions de médicaments, la description des maladies et les actes hospitaliers. Elle est toutefois délicate à exploiter, car la base a été créée pour l’analyse économique des prestations de santé et non pour une analyse médicale. Ainsi, une personne hospitalisée pour un problème respiratoire sera traitée pour ce problème sans nécessairement faire mention du cancer qui l’affecte par ailleurs. On relève, dans certains cas, 30% d’erreurs dans la description des pathologies associées aux malades. Corriger ces erreurs passe par le croisement des données avec d’autres sources, comme celles correspondant aux médicaments administrés.

Protéger les données personnelles
Une plateforme nationale de santé regroupant toutes les données santé de la population est une ressource inestimable pour les praticiens, mais aussi pour la recherche médicale et pharmaceutique. Néanmoins on doit s’assurer que ces données sont utilisées à bon escient et dans le respect des lois, en particulier du règlement général sur les données personnelles (RGPD) entrée en vigueur en mai 2018 et de la loi pour une république numérique de 2016.
Dans ce cadre, les données personnelles ne sont pas la propriété du patient, ni celle de l’organisme qui les collecte. Les Français sont usufruitiers de leurs données : ils peuvent en disposer mais non les vendre. D’autre part, le traitement de ces données est conditionné au consentement éclairé de la personne concernée. En France, les données de santé sont anonymisées pour être accessibles par les chercheurs, uniquement sur des projets autorisés.

Croiser les multiples données textuelles relatives aux patients
Autre problème soulevé par l’exploitation des données médicales, 80% des informations sur les patients sont textuelles (comptes rendus d’hospitalisation ou rapports d’imagerie par exemple). Il s’agit alors de mettre en œuvre des logiciels de traitement automatique des langues pour analyser ces textes et en extraire des informations sur le patient (fouille de données).

Ces logiciels peuvent mobiliser une approche symbolique ou des approches fondées sur les réseaux de neurones. Les algorithmes d’apprentissage non supervisé (sans apprentissage préalable sur des échantillons) suscitent des espoirs dans ce domaine : ils permettent en effet de recouper rapidement un très grand nombre de données afin d’établir des structures cachées et de déterminer des catégories d’intérêt pour la tâche visée. On espère de cette façon pouvoir mieux identifier des facteurs de risques, personnaliser les traitements et en vérifier l’efficacité, prédire les épidémies ou améliorer la pharmacovigilance.
Ces algorithmes peuvent être très performants mais nécessitent encore beaucoup de recherches avant de pouvoir être utilisés de façon fiable.

Fournir l’information au bon moment et au bon niveau
Depuis quelques années, des projets plus ciblés dans leurs objectifs se concrétisent. Par exemple, en 2010, les chercheurs du LIMICS ont participé à la conception d’un logiciel de traitement automatique des langues dans le cadre du projet Lerudi (pour Lecture rapide en urgence du dossier informatique du patient). Ils ont piloté le développement de l’ontologie des urgences qui entre dans la mise au point d’un prototype de moteur de fouille du dossier médical du patient ou du futur dossier médical partagé de la CNAM. Destiné aux urgentistes, l’outil doit répondre à leurs besoins, en l’occurrence, porter à leur connaissance des informations essentielles (comme les prescriptions médicamenteuses qui permettent d’identifier des pathologies pré-existantes) dans les quelques minutes dont ils disposent pour prendre une décision.

Ontologie convergeant vers un diagnostic d’appendicite dans le cadre du projet Lerudi. Dans le contexte de l’IA symbolique, les connaissances sur un domaine médical sont organisées dans une ontologie, c’est-à-dire un ensemble structuré de concepts et de leurs relations, qui décrit un domaine en respectant des principes des langages formels. Une ontologie fournit un modèle de données permettant de raisonner à l’intérieur du domaine en question.

Par ailleurs, un système d’aide à la décision en analyse d’échographies pour les grossesses extra-utérines (GEU) développé par le LIMICS et l’hôpital Trousseau, OPPIO, entre en phase de tests en 2019. Il est soutenu par une ontologie qui fournit un modèle centré sur les signes du domaine, avec les relations entre les signes des différents types de grossesse extra-utérine, les structures anatomiques et les éléments techniques. Ce système permet au médecin de sélectionner un type de GEU et de se voir proposer les signes pertinents à rechercher et les images de référence associées.

OPPIO : un outil d’aide à la décision en imagerie médicale développé en collaboration avec l'Inserm.
L’interface permet de mieux analyser les images échographiques de grossesses débutantes et
propose des protocoles personnalisés d’aide au diagnostic.
crédits : F Dhombres, unité Inserm 1142/AP-HP, Hôpital Trousseau, service de médecine fœtale/Médecine Sorbonne Université/SATT-Lutech

Apporter une réelle aide à la pratique médicale
Pour qu’une application soit utilisée par le médecin dans sa pratique quotidienne, il ne suffit pas qu’elle rende le service qu’on lui demande, il faut également que le système soit commode ! Par exemple un système conçu pour alerter sur de possibles contre-indications médicamenteuses ne doit pas saturer le praticien d’alertes "justes", mais non adaptées au contexte clinique du patient. Ainsi, au lieu de donner une alerte chaque fois qu’une contre-indication se présente, les nouvelles interfaces posent en amont des questions sur le patient, afin de réduire le nombre d’alertes et, ainsi, la tendance du médecin à débrancher une machine "importune".

Donner les moyens de comprendre la décision
Pour être acceptables ou légitimes, voire pour être écartées car jugées non pertinentes, les décisions de l’algorithme doivent pouvoir être comprises, donc expliquées. Un avantage majeur des approches symboliques est de permettre de tracer le cheminement du raisonnement. Mais même dans ce cas, le nombre de micro-raisonnements effectués par la machine est tel qu’il n’est pas pensable de tous les afficher. C’est pourquoi des chercheurs travaillent actuellement sur la manière de décrire ces raisonnements "en classes explicites", afin de mettre en avant les décisions les plus importantes. Seule une bonne compréhension des solutions proposées par l’application peut en effet permettre au médecin de discuter avec son patient et de lui exposer les alternatives possibles.
Les approches numériques s’apparentent en revanche à une boîte noire, incapable de justifier ses décisions : nul ne sait ce que fait l’algorithme. Comment, dès lors, endosser la responsabilité de la décision médicale ? Les données d’apprentissage sont en particulier biaisées par les préjugés de l’époque et ceux des concepteurs. L’algorithme tend donc à reproduire, voire renforcer, ces mêmes préjugés. Dans le domaine médical, les biais principaux sont dus à la surreprésentation d’une catégorie de personnes, comme les personnes âgées ou des patients d’origine géographique particulière.

L’enjeu du futur est de combiner les approches
Des projets tentent de combiner les approches symbolique et d’apprentissage, afin de bénéficier à la fois du raisonnement de l’un et des performances de l’autre. Ainsi, dans le projet Lerudi cité plus haut, la construction d’ontologies (IA symbolique) est faite à partir d’algorithmes numériques de fouille de texte.
Autre exemple, l'interprétation d'images médicales pédiatrique est d'une importance majeure pour le diagnostic, le suivi des patients ou encore la préparation d'une intervention chirurgicale. Il s'agit de détecter, segmenter et reconnaître des structures anatomiques normales et pathologiques, et d'en proposer des visualisations 3D. Pour répondre à la difficulté de ces tâches, il est important de combiner les informations numériques extraites des images, donc spécifiques au patient, à des modèles génériques, représentant les connaissances anatomiques sous la forme de bases de connaissances, d’ontologies, de graphiques…. C’est en particulier crucial avec les images pédiatriques qui doivent être acquises sur des durées aussi brèves que possible et qui montrent des structures souvent de petite taille et de grande variabilité d'un patient à l'autre.
Cette double approche est aussi particulièrement pertinente pour exploiter les données "variées" des patients (génomiques
génomiques
Étude conduite à l’échelle du génome, portant sur le  fonctionnement de l’organisme, d’un organe, d’une pathologie...
, cliniques, d’imagerie et d’analyses biologiques) qui seront regroupées sur une même plateforme dans le cadre du Plan France médecine génomique 2025. L’IA permettra de gérer ce nombre considérable de données en fournissant des classifications ou des ontologies de description des éléments cliniques des patients. L’apprentissage automatique permettra d’identifier des profils de patients tenant compte de toutes ces données. Il sera alors possible de personnaliser les soins et d’améliorer leur taux de réussite, notamment, dans un premier temps, pour les cancers, les maladies rares et le diabète.

Aider le médecin et non le remplacer
Certains voient dans les applications médicales de l’IA la possibilité de remplacer le médecin, que ce soit pour pallier les déserts médicaux ou bien pour filtrer les patients et les orienter. Mais l’utilisation par le public de ces logiciels sans supervision médicale soulève des questions éthiques importantes. Le système réduit la relation au médecin à un acte technique. Il laisse le patient à ses interrogations et ses angoisses.
Par ailleurs, le risque que le médecin abdique devant la machine « qui sait mieux que lui » est réel. Il peut être amené à endosser une décision qui n’est pas la sienne et découvrir après coup que la machine s’est trompée. Pour éviter cet écueil, le médecin, seul habilité à porter un diagnostic, doit pouvoir garder son autonomie face à la machine.  Il doit être en mesure de comprendre le pourquoi et le comment des décisions affichées, et de les contourner si besoin.
Dans cet objectif la commission de réflexion sur l’éthique de la recherche en sciences et technologie du numérique d’Allistène (Cerna) souligne la nécessité de concevoir des systèmes dont le fonctionnement est transparent, explicité et traçable, et qui effectuent les tâches spécifiées en respectant des contraintes explicites. Pour des systèmes d’aide à la décision fondés sur des algorithmes d’apprentissage, le respect de cette conformité n’est pas évident.

Sciences cognitives : source d’inspiration et domaine d’application
Malgré les énormes capacités de calcul offertes par les ordinateurs actuels, aucune application existante ne peut s’afficher comme réellement intelligente : elle devrait pour cela être multitâches et capable de réagir correctement dans des situations non prévisibles et non préprogrammées. On est encore très loin du compte.
Pour progresser dans cette voie les chercheurs essaient de comprendre le comportement des neurones et de leurs connexions, afin d’être en mesure de mimer le cerveau. Cette démarche permettra peut-être un jour de créer des robots imitant l’intelligence humaine. En attendant elle contribuera à mieux comprendre le fonctionnement de cet organe et à mieux appréhender les causes de certaines maladies d’origine cérébrale comme Alzeimer, Parkinson ou la maladie de Charcot. C’est l’objectif qui motive la participation de l’Union européenne, dans le cadre de son initiative phare Technologies futures et émergentes, au Human brain project. Ce projet vise à construire une infrastructure informatique de classe mondiale, qui pourra être utilisée par la communauté scientifique pour simuler le fonctionnement cérébral dans des conditions expérimentales particulières.

 

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EXCLUSIF. Nouvelle polémique autour de la maladie de Lyme

 

 

 

 

 

 

 

SANTÉ

EXCLUSIF. Nouvelle polémique autour de la maladie de Lyme

Par Olivier Hertel le 05.06.2018 à 09h53


Alors qu'il est prêt depuis plusieurs semaines, le nouveau protocole de prise en charge de la maladie de Lyme (PNDS) n'a toujours pas été publié par la Haute Autorité de Santé (HAS). En cause, une lettre de contestation envoyée à la HAS par la Société de Pathologie Infectieuse de Langue Française (SPILF), le Centre National de Référence des Borrelia (CNR) et onze sociétés savantes. Une lettre que nous révélons en exclusivité. Décryptage.


IMBROGLIO. C'est un imbroglio surréaliste qui vient encore envenimer les débats sur la maladie de Lyme. Depuis plusieurs semaines, la Haute autorité de santé (HAS) doit rendre public le fameux Protocole National de Diagnostic et de Soins de la maladie de Lyme (PNDS). Ce protocole vise notamment à définir les modalités de diagnostics et de traitement de la maladie. Il a été élaboré pendant plus de 18 mois par la HAS en partenariat avec la Société de Pathologie Infectieuse de Langue Française (SPILF) et en concertation avec les médecins, associations de patients et plusieurs sociétés savantes. Très attendu par les malades, il a été validé par la HAS début avril 2018 et devait être diffusé dans la foulée. Mais de manière inattendue, sa publication a été repoussée à la mi-juin. En cause, un courrier électronique envoyé à la HAS par la SPILF, co-signé par onze autres sociétés savantes et le Centre National de Référence des Borrelia (bactérie responsable de la maladie). Ce courrier que nous publions intégralement, conteste le contenu du PNDS et en particulier la partie concernant le diagnostic de la maladie. “Nous trouvons que ce texte n'est pas clair, notamment pour les médecins qui sont en première ligne avec les malades. Nous souhaitons que les tests de dépistage Elisa et Western Blot soient bien indiqués. Si la maladie n'est pas confirmée par ces tests, il faut demander une expertise auprès des centres de prise en charge des malades” commente France Roblot, présidente de la SPILF. En d'autres termes, les fameux tests de dépistage (appelée aussi sérologie) doivent rester la référence pour le diagnostic de la maladie. La SPILF tente ainsi de ramener le PNDS à la position qu'elle avait élaborée en 2006 (Consensus de 2006).

Or, ces tests sont justement au coeur d’une des plus importantes polémiques autour de la maladie de Lyme. Leur fiabilité est largement remise en cause dans la littérature scientifique récente, comme nous le signalions déjà ici. Aux Etats-Unis, le Centre pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC) recommande leur utilisation mais plaide pour le développement de nouveaux tests alternatifs. D’ailleurs en mai, un rapport fédéral américain sur les tests et le diagnostic de la maladie de Lyme rappelait encore la faiblesse du dépistage actuel source de faux positifs et faux négatifs.

CONTROVERSE. Face à cette controverse, le PNDS avait justement été lancé pour remplacer le Consensus de 2006. Dans sa version définitive, validée en avril, il prévoyait de fonder en partie le diagnostic sur la clinique du patient, c’est-à-dire sur ses symptômes. Cette situation concerne des malades que le texte du PNDS qualifie par l’acronyme SPPT pour “Symptomatologie/syndrome persistant(e) polymorphe” - les experts n'ayant pas réussi à se mettre d'accord sur les termes symptomatologie ou syndrome ! Comme le précise le nouveau texte, ces patients peuvent déjà avoir été traité dans le passé pour la maladie de Lyme avec une cure d’antibiotiques. Le SPPT se caractérise par :
1/ Une piqûre de tique possible


2/ Une triade de symptômes

*         douleurs musculo-squelettiques et/ou d’allure neuropathique et/ou
céphalées
*         une fatigue persistante avec réduction des capacités physiques
*         des plaintes cognitives (troubles de la concentration et/ou de l’attention, troubles de la mémoire, lenteur d’idéation)
3/ Avec ou sans antécédent d’érythème migrant (premier signe de la maladie formant un anneau rouge autour de la piqûre) cette manifestation pouvant passer inaperçue ou être oubliée par le patient.

CHRONIQUE. Sans parler explicitement de maladie de Lyme chronique - autre point de discorde entre les malades et une partie de la communauté médicale et scientifique - le texte reconnaît donc que des symptômes évoquant la maladie de Lyme peuvent persister chez des personnes ayant pu être traitées aux antibiotiques. Jusque-là, la prise en charge officielle considérait que si des symptômes persistaient après le traitement antibiotique, cela n’avait rien à voir avec la maladie de Lyme ou alors qu'il s'agissait de séquelles. Les patients qui se plaignaient toujours de leurs maux se retrouvaient très vite en consultations psychiatriques !
Avec la reconnaissance de cette symptomatologie/syndrôme (SPPT), le PNDS laisse la possibilité de traiter le malade avec une cure d’antibiotique de 28 jours, si l’examen différentiel clinique permet d’écarter les autres maladies. Et ce, même si les tests de dépistage (Elisa et Western Blot) sont négatifs. Là encore c'est un changement de taille dans la prise en charge des malades. Les tests jugés non fiables, ne sont plus tout puissants dans le diagnostic.
Dans la lettre envoyée à la HAS, les signataires contestent aussi la dénomination SPPT jugée trop floue et demandent à ce qu’elle soit encore discutée. Ils demandent aussi à poursuivre les réflexions qui ont pourtant déjà duré 18 mois en partenariat étroit avec la SPILF et abouti à un texte validé par la HAS.
D’après nos informations, la HAS aurait accédé à la demande de la SPILF en rajoutant dans le texte, l’indication des deux tests (Elisa et Western Blot), comme tests de référence pour le dépistage. Mais ces tests sont seulement “recommandés”. Une façon de relativiser leur importance s’ils s’avèrent négatifs. Le malade peut alors entrer dans la définition du SPPT, bénéficier d’une prise en charge complète avec notamment un examen clinique très poussé.
Par contre, malgré les contestations de la SPILF, la HAS conserve la définition du SPPT. Pas question de la supprimer ou de la rediscuter.

POURSUITES. Fait étonnant, cette lettre de la SPILF arrive au moment où le PNDS venait d'être validé par tous les acteurs de son élaboration, dont les représentants de la SPILF. Le texte a été effectivement âprement discuté et amendé pour trouver un consensus. Ce revirement a donc de quoi surprendre. Mais il y a encore plus étonnant. Pour avoir plus de poids auprès de la HAS, la SPILF a donc sollicité plusieurs présidents de sociétés savantes pour signer la lettre, parmi lesquels la Société Française d’Immunologie (SFI) présidée par Hans Yssel, directeur de recherche à l’Inserm. Or, cette signature résulte d’une confusion entre le chercheur et France Roblot, la présidente de la SPILF (lire notre interview de Hans Yssel ci-dessous). En effet, la Société française d’immunologie ne soutient pas du tout l’initiative de la SPILF et retire sa signature de la lettre.
La tension extrême qui entoure le PNDS n’est donc pas prête de retomber. Elle s’explique d’une part par le retard pris dans la publication du texte mais aussi par la pression qu’exerce les associations de malades pour obtenir une meilleure prise en charge. Outre, leur grande réactivité sur les réseaux sociaux, elles mènent une action collective en justice visant notamment le Centre National de Référence des Borrelia dirigé par le Pr Benoît Jaulhac, fervant partisan des tests et opposé à la reconnaissance de la forme chronique de la maladie de Lyme. Or, le PNDS tel qu’il a été rédigé dans sa version finale reconnaît implicitement que les tests ne sont pas suffisamment fiables. S’il sortait en l’état, cela donnerait des arguments supplémentaires aux avocats des malades pour faire reconnaître leur préjudice. Fait aggravant, nous avons pu montrer dans un précédent article, un possible conflit d’intérêt entre les membres du CNR et le laboratoire BioMérieux reposant sur un document publicitaire vantant technologies de test pour le dépistage de la maladie de Lyme de BioMérieux... signé par les membres du CNR Borrelia. Un document sur lequel compte bien s'appuyer les avocats.
 
Interview Hans Yssel, directeur de recherche à l’Inserm et président de la Société Française d’Immunologie

Sciences et Avenir : Comment la Société Française d’Immunologie (SFI) s’est-elle retrouvée parmi les signataires de la lettre envoyée par la SPILF à la HAS ?

Hans Yssel : En janvier 2018, la HAS a sollicité la SFI pour une relecture du PNDS. Les corrections que nous avons apportées concernent essentiellement la nécessité d’améliorer la qualité du diagnostic notamment parce que les tests ELISA sont peu fiables. Le deuxième point étant une nécessité d’affecter des budgets, sous forme d’appels d’offres, pour permettre aux unités des Instituts de recherche de faire un travail de qualité sur les formes les plus problématiques de la maladie.

Le 3 mai, soit trois semaines après la validation définitive du PNDS, j'ai reçu un mail pressant de France Roblot, la Présidente de la SPILF : "nous souhaitons adresser un courrier à la présidente de la HAS pour demander à ce que la réflexion se poursuive à propos de PNDS sur la maladie de Lyme. Je vous propose de vous associer en tant que signataires. Ce courrier est attendu par la présidente de la HAS. Il faut absolument que je connaisse votre position au plus vite."

Vous avez donc signé cette lettre ?

J’ai pensé qu’il s’agissait d’une simple confirmation des corrections que j’avais apporté au PNDS, sans réaliser à aucun moment que ce mail était accompagné d’une mouture d’un courrier, et ai donné en tant que Président de la SFI un accord de principe. Courrier que je découvrirai un mois plus tard, et que je ne peux cautionner. Pas plus que les démarches multiples entreprises par la SPILF à titre collectif, et visant au déni de la forme chronique d’une pathologie complexe, dont la composante immune semble importante pour en comprendre sa pathogénèse.

 

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